Oeil-de-Nuit est le réel Roi. Le Fou versus la Femme Pâle : le combat du siècle. Oh Malta, Malta, Malta. Gloire au dragon fou Glasfeu. Les Anciens ne sont que des gosses. Keffria, tu remontes dans notre estime. Il était une fois Clerres.

Article épinglé

Petit-Furet dans la légende

Il existe des personnages qui paraissent anodins et qui ont un grand impact sur l’histoire. Il existe des personnages qui accomplissent des ...

lundi 15 septembre 2025

Laurier et le Vif

Laurier est une femme intéressante. Elle a grandi dans une famille de gens ayant le Vif alors qu’elle n’avait pas cette magie. Elle a rejoint les Loinvoyant alors que beaucoup de Vifiers se méfient d’eux.


Son enfance a grandement marqué Laurier (« j’ai connu des vifiers autrefois, j’ai supporté le mépris de ceux qui ne possèdent pas leur magie »). Ce message si souvent entendu a causé du tort aux Vifiers. Il a poussé à ce qu’ils soient mal vus, marginalisés, chassés et tués. Il a laissé la place à plein de préjugés et a permis l’essor d’une mauvaise conception de cette magie. Car, pour pas mal de gens ayant le Vif, vivre sans est impossible. C’est encore pire pour Laurier puisque presque toute sa famille a un compagnon de Vif. Tous sauf elle.


Laurier, elle-même, développe une forme de mépris ou en tout cas de suspicion. Elle développe une attitude tant répandue parmi les détracteurs : « ce n’était pas juste. On ne pouvait jamais être sûr qu’on était seul, car on ne savait pas si le voisin n’était pas en train d’espionner par les yeux et les oreilles d’un oiseau ou d’un renard en maraude ». Autrement dit, même en ayant baigné dans le milieu du Vif, Laurier reproduit tous les préjugés associés à cette magie. Ce discours et cette sensation d’être observé en permanence ont conduit à des meurtres et des ignominies (comme le Cirque du Roi créé par Royal ou des purges).

Laurier finit par dire que « cette magie est ignoble ». Elle développe ensuite son argumentaire : « ils partagent déjà leur vie et leur foyer avec une bête, pourquoi tromper une femme ou un homme en se mariant ? On devrait obliger ceux qui ont le Vif à se décider très tôt s’ils vont lier leur existence à un animal ou à un humain ». A-t-elle tort ? En effet, Fitz a souvent dit son lien avec le loup Oeil-de-Nuit lui suffisait. On a aussi vu que la mort d’un compagnon de Vif (animal ou humain) pouvait causer un deuil insurmontable (Petit-Furet en est un bon exemple tout comme la biche qui accueille sa compagne humaine après la mort de celle-ci). Fitz ne s’est mis avec Molly qu’après la mort d’Oeil-de-Nuit.Tout cela peut aller dans son sens. Mais, l’inverse est aussi vrai. Rolf avait un compagnon de Vif (un ours) et s’est quand même parié à une femme (qui avait, certes, aussi le Vif). Surtout, il est difficile de généraliser toute une population à quelques cas.


Laurier semble être experte pour poser les questions qui fâchent. Elle est témoin de la mort d’Oeil-de-Nuit et de la détresse que cela crée en Fitz. Elle s’interroge : « comment peut-on laisser un animal s’emparer si complètement de son coeur en sachant la brièveté de son existence ? Qu’y a-t-il à gagner qui vaille la douleur qu’on ressent chaque fois que son compagnon meurt ». Cette question est légitime puisque bien peu d’animaux peuvent vivre si longtemps que les humains. Se lier à un animal revient donc à s’infliger une souffrance énorme par avance, selon Laurier en tout cas. Ce point de vue pourrait être partagé par Burrich : si il ne parle pas nécessairement de la mort d’un animal, Burrich pense que se lier à un animal est une malédiction.


Laurier apparait dans l’histoire alors que le prince Devoir vient d’être enlevé par les Pie, une branche extrême de la communauté du Vif qui cherche à détruire les Loinvoyant.

La traque va pousser Laurier dans ses retranchements et la mener à des situations et choix compliqués. Surtout, elle fait face à sa famille, notamment son cousin Fradecerf. C’est d’autant plus dur pour elle que ce dernier est à deux doigts d’être torturé par Fitz, désespérément en quête d’indices. Fradecerf est capturé après une embuscade où il blesse Laurier (« je ne vous ai pas reconnu, cousine, je vous le jure, même pas quand ma flèche s’est fichée dans votre épaule »). 

Les retrouvailles avec Fradecerf rouvrent des traumatismes du passé. Elles montrent à quel point la jeunesse de Laurier a pu être compliquée, à quel point Laurier a pu se sentir rejeté. Durant ses jeunes années, sa fratrie a fait preuve de bien peu de finesse et même de cruauté. Fradecerf témoigné que « votre propre frère vous surnommait la taupe parce que vous avanciez en aveugle, dans un monde noir et froid alors que nous courions librement, les yeux grands ouverts ». Les vifiers peuvent donc eux-aussi avoir des préjugés. 


Suite à la libération de Devoir, la situation de Laurier se complique. Elle devient une traîtresse, une cible à abattre par les Pie (« par la famille dont je suis issue, ils me considèrent comme du Lignage, or je sers le régime Loinvoyant qu’ils haïssent. Ils me tueront s’ils en ont l’occasion »). Et le pire se produit. Même à Castelcerf, Laurier n’est pas à l’abri. Les Pie la frappent en tuant sa jument Casqueblanc (« elle a longtemps agonisé Tom, et je n’étais même pas là pour lui procurer une mort plus douce ni lui dire adieu »). Même si elle n’a pas le Vif, Laurier fait donc preuve de compassion et montre, à sa façon, que les non-vifiers peuvent aimer les animaux, ressentir des liens forts avec eux.

samedi 13 septembre 2025

[Sur Reddit] Pourquoi est-ce que Fitz ne voit pas Chevalerie dans le courant d'Art ?

https://www.reddit.com/r/robinhobb/comments/1nfmgor/regarding_skill/

Why is there no trace of chivalry in the skill current? We know that Verity is a major being in the skill current and when chade is dying he reaches out to Fitz and says he feels shrewd in the skill current along with others but at no point is chivalry mentioned as a presence in skill current

Yet time and again a being saves Fitz in the current in later books I assumed that was Verity but in the first instances was that Chivalry in the skill current saving Fitz? as he was always supposed to be a very strong in it


J'ai déjà parlé du Courant d'Art dans ce billet : https://duchessix.blogspot.com/2021/07/le-courant-dart.html

La question est de savoir si Fitz rencontrerait Chevalerie. Il est difficile de répondre avec certitude tant ce lieu reste mystérieux. On a seulement un très petit aperçu de ce qu'il peut contenir. Fitz y rencontre bien une créature majestueuse identifiée. En ce qui concerne les humains, il y voit Subtil, Vérité et Umbre, autrement dit que des gens avec qui il a eu un lien. Or, Fitz n'a pas rencontré Chevalerie et rien ne laisse supposer que les deux se sont artisés. On sait que Chevalerie artisait régulièrement Vérité, et parfois Subtil. Pour le reste, il n'y a aucune occurence d'une expérience d'Art. C'est donc peut-être pour ça que Fitz ne sent pas Chevalerie dans le courant.

lundi 8 septembre 2025

La Femme Pâle avait-elle raison ?

Dans le tome L’homme noir, la Femme Pâle parvient à capturer le Fou et Fitz. En les retenant dans les profondeurs d’Aslevjal, elle atteint un objectif qu’elle s’était fixée depuis longtemps. Surtout, elle rencontre enfin FitzChevalerie Loinvoyant et elle tente de faire de lui son Catalyseur. Mais, c’est un objectif ardu tant Fitz est sous l’emprise du Fou. Fitz est un homme du Fou et il en est fier. La Femme Pâle tente de le convaincre que leur relation est inégale, que le Fou profite de lui et qu’il obtient bien plus que ce qu’il donne : « il danse aux frontières de votre compréhension et vous jette parfois d’infimes indices sur sa véritable nature, comme on jette de petits morceaux de sucre à un chien ». Alors, la Femme Pâle a-t-elle raison ?


Il y a eu de nombreuses fois où l’attitude secrète du Fou a énervé Fitz. Le fou pouvait décider de ne rien dire ou changer de sujet ou s’exprimer de façon peu compréhensible. Il a usé de différents stratagèmes pour éviter d’en dire trop sur lui ; cela ne veut pas dire qu’il ne parlait jamais de lui (au contraire, il a révélé très tôt et plusieurs fois dans l’intrigue à Fitz d’où il venait et qui était sa famille). Il y a eu de moments où cela a pesé pour Fitz et cela l’a fait éclater de colère. C’est le cas quand Fitz est dans la carrière et tente d’aider Vérité à finir son dragon d’Art et de pierre pour lutter contre les Pirates Rouges. Là, Fitz fait face au mutisme de Caudron, de Vérité et du Fou. C’en est trop pour lui et sa fureur est manifeste (« personne dans ce groupe ne veut parler de rien ! »). Ici, s’il en veut au Fou, c’est que ce dernier refuse de lui expliquer ce qui se passe entre la Fille-au-dragon et lui.

Toutefois, il serait injuste de dire que cette manie du Fou à cacher sa vie énerve Fitz. Fitz a souvent été exposé au regard de la cour, on l’a montré du doigt comme étant un bâtard et il ne pouvait pas avoir sa vie à lui. Même s’il est en marge de la famille royale, il reste le fils d’un ancien roi-servant ; autrement dit, il ne peut pas faire ce qu’il veut. Ce n’est pas le cas du Fou qui n’est vu que comme le bouffon du roi, un amuseur, un homme de blagues. Cela lui procure un certain anonymat même si des gens rient de ses blagues et tours. Le Fou n’a pas de pouvoir, ce qu’il fait en dehors de ses tours n’a donc aucun intérêt. Un jour, un Fitz curieux grimpe les escaliers et se rend dans la chambre du Fou. Il s’en veut ensuite, il a l’impression d’avoir violé son intimité. Dans ses excuses au Fou, on sent aussi une pointe d’amertume et d’envie : « ça m’a fait regretter de n’avoir pas un coin qui me ressemble autant que ta chambre te ressemble, un jardin secret comme le tien ».


Il serait injuste de dire que le Fou ne se livre pas. C’est simplement qu’il n’est pas sans cesse à parler de lui, à parler de ce qu’il fait à tout bout de champ. Il sait que le mystère fait partie de sa protection et sans doute aussi de son charme. Il sait que cela fait de lui un être mystérieux. Il comprend aussi que ses secrets peuvent être monnayés et peuvent l’aider à atteindre son but. C’est le cas quand il se lance à la recherche des Anciens. Il propose d’étancher la soif de curiosité de Fitz contre un accès à des documents ; la proposition est claire : « un secret que je détiens contre la permission de me chercher dans les manuscrits un secret (…) le mystère du Fou. D’où il vient et pourquoi ». On peut aussi noter que cette donnée est très importante s’il est enclin à briser sa carapace.


Fitz n’est pas le seul à subir les manigances du Fou. Dans les Aventuriers de la mer, on rencontre le personnage de Jek. C’est une femme avec qui le Fou noue une réelle amitié. Seulement, Jek ne connait pas le Fou sous cette identité, mais sous celle d’Ambre, une fabricante et marchande de bijoux. Jusque là, pas de problème. Mais, des années plus tard, quand le Fou revient à Castelcerf, il se fait sous l’identité de Sire Doré. Et, quand Jek est de passage à Castelcerf, elle se rend compte que le Fou lui a menti. Certes, elle n’en fait pas tout un scandale comme Fitz. Elle est simplement étonnée : « si je n’étais pas au courant, je me serais laissée abuser ! Mais je ne comprends à quoi sert ce subterfuge ». Jek n’est pas réellement choqué que Ambre soit devenu Sire Doré, elle l’est plus qu’elle ne dise rien à Fitz. Selon Jek, Fitz est pourtant le grand amour d’Ambre, celui qui a servi de modèle pour sculpter une figure de proue ! Quand Sire Doré (le Fou ou Ambre) doit s’expliquer, il fait dans le mélodrame et l’exagération. Il la supplie de se taire car si elle « raconte ce que tu sais dans une taverne un soir et c’est comme si tu me tranchais la gorge ». 


Oeil-de-Nuit avait baptisé le Fou en Sans-Odeur. C’est une bonne indication de ce qu’il est, un homme difficile à saisir. Trame, sans doute un des utilisateurs le plus puissant du Vif, ressent la même chose : « même après avoir entendu son nom, j’ai gardé l’impression que je ne le connaissais pas du tout (…) Je le trouve très insolite ; arrivez vous à le percevoir ? » On pourrait penser que Trame est sous le choc de l’arrivée surprise du Fou à Aslevjal ou étonné de voir qu’il a changé d’identité et n’a plus rien de Sire Doté. Mais, cela dépasse ça : même en déployant son Vif, il ne parvient pas à le saisir.


En réalité, très peu de gens peuvent percer le Fou à jour et cela lui plait. A chaque fois que son identité a été découverte, le Fou a été mal à l’aise. Il se sentait exposé, presque en danger. C’est ce qu’il explique à Fitz alors qu’il revient dans la vie de son ami (dans le tome le Prophète blanc). Il lui explique que « toi, tu m’as donné un nom : le Fou, et tu m’as vu , tu as soutenu mon regard quand les autres, désorientés, détournaient le leur ». Là, on comprend que le Fou jouait aussi de son apparence différente pour se tenir volontairement à l’écart. Quand on persistait, cela le mettait mal à l’aise (« t’es-tu jamais douté de l’effroi que tu as suscité en moi ? « )


Kettricken dit de lui que « ce n’est pas un homme comme les autres ». Elle semble accepter et comprendre son besoin de se protéger ou cacher qui il est. 

Encore une fois, ce n’est pas le cas de Fitz. Le bâtard de Chevalerie commet un de ses actes les plus lâches quand il confronte le Fou. Sa colère lui fait perdre toute mesure. Il a peur qu’on soupçonne une aventure entre Sire Doré et Tom Blaireau, son identité à cette époque (« c’est grave, et je veux savoir une fois pour toutes ! Qui es-tu ? Je connais le Fou, je connais Dire Doré, et je t’ai entendu t’adresser à cette Jek d’une voix de femme »). Il n’est pas seulement désespéré, il se sent également trahi. Le Fou ne lui donne pas de réponse claire, il se contente de lui dire que Fitz a déjà tous les éléments en main pour trouver la réponse. Et c’est vrai.


Le tome Adieux et retrouvailles marque un tournant dans la vie de Fitz et du Fou car ils perdent un lien unique qu’ils avaient, le lien d’Argent et d’Art. C’était cela qui permettait à Fitz d’avoir toujours le Fou quelque part près de lui. Le Fou le lui enlève : il sait que leur aventure est terminée, qu’ils doivent maintenant prendre des directions différentes. Fitz n’a plus en face de lui qu’un étranger : « mon ami d’enfance, mon compagnon d’adolescence avait disparu. Il avait détourné de moi cette facette de lui-même. Un homme à la peau brune et aux yeux noisette me regardait d’un air compatissant ».