A
la fin de la Reine Solitaire, Fitz se retire du monde, il part vivre
près de Forge avec son fils adoptif, Heur, et reçoit de temps en
temps les visites d'Astérie. Kettricken s'en va régner sur les
Six-Duchés, le Fou est on ne sait où.
S'ouvre
donc le septième tome (Le Prophète Blanc). Nous faisons face à un
Fitz vieilli qui vient de refuser la proposition d'Umbre de devenir
le maître d'Art d'Ortie et de Devoir. Et tout d'un coup, le Fou
revient, pas le bouffon du Roi Subtil, non un fou qui a une riche
apparence, des vêtements et un cheval de qualité.
Alors
que leurs présences respectives ont toujours suffi à Fitz et
Oeil-de-Nuit, le loup se rend compte que la présence du Sans-Odeur a
solidifié leur relation. Le retour du Fou offre la possibilité à
Fitz de se confesser à cœur ouvert, de parler de tout, de ses
doutes, rêves perdus et déceptions, de ses voyages. Et de temps en
temps, il sort des propos qui vont jusqu'à remettre le Fou dans le
droit chemin.
Très
vite, il faut revenir à Castelcerf : le prince Devoir a
disparu ! Mais Fitz ne peut pas revenir comme ça, il lui faut
une identité, un moyen de se glisser discrètement dans la vie du
château. Il sera alors le serviteur de Sire Doré ; ce dernier
le met très vite en garde, certes ils sont proches et amis mais le
danger est partout et ils doivent jouer une partie serrée
(« FitzChevalerie, la partie est finie avant même d'avoir
commencé si tu n'es pas capable de tenir ton rôle sans la moindre
faille »).
Fitz
parvient à retrouver la trace de Devoir du côté de Myrteville et
arrive alors une première scène qui montre des doutes de Fitz quant
au personnage de Sire Doré. Pour pouvoir se lancer à la poursuite
de Devoir et en même temps remplir les obligations de son personnage
de noble, le Fou doit trouver un moyen (sulfureux) de s'échapper :
il décide d'embrasser Civil, un jeune noble. Et bien entendu, Fitz
est choqué ! On lit : « les manœuvres du Fou
étaient peut-être nécessaires mais je m'en sentais sali ».
Accompagnés
de Laurier, nos deux héros finissent par capturés un jeune archer
qui devrait les conduire à Devoir. Mais pour cela, il faut obtenir
des renseignements et Fitz est prêt à user de moyens extrêmes tout
en sachant que ça détruirait le respect que le Fou lui porte. Et le
bâtard royal tire la conclusion implacable (en parlant du fou) qu'il
devrait l'éliminer (« je devais le tuer, lui aussi, afin qu'il
ne puisse jamais me regarder avec ces morts dans les yeux »).
Le prisonnier finit par s'évader, Oeil-de-Nuit l'ayant laissé
partir. Le fou doute (« j'en suis même venu à me demander si
je te connaissais vraiment »).
S'il
a peur parfois de Fitz, le Fou est le seul à pouvoir lui ôter sa
folie meurtrière lors de la mort de la marguette de Devoir. Il le
soulage comme il le soulageait lors des migraines d'Art et les gens
autour semblent marqués par cette prouesse : « j'entendis
un murmure stupéfait parcourir la foule, comme s'il venait
d'accomplir un geste d'une bravoure extraordinaire »).
Nous
sommes donc quasiment arrivés à la fin du tome huit (la secte
maudite) marquée par la mort d'Oeil-de-Nuit. On fait alors face à
une faiblesse dans les déguisements de serviteur et de noble
adoptés. Le fou est dans l'incapacité de pouvoir aider Fitz sans se
trahir, le laissant porter seul son fardeau et sa peine.
Finalement,
ce sera Kettricken qui parviendra à partager ce poids avec Fitz, au
grand désespoir du Fou. Il est envieux ; « même si je
suis jaloux de Kettricken (…), je l'envie d'avoir su te consoler.
Entre-temps,
sur le chemin du retour, Devoir avait demandé à savoir qui étaient
ses deux libérateurs. Fitz fait alors preuve de sincérité : « c'est
un ami, mon prince, le meilleur que j'ai jamais eu ».
Et
puis tout bascule quand débarque Jek. Jek, si vous ne le savez pas,
est un des personnages de la saga des Aventuriers de la Mer. C'est
une femme libre, forte et partenaire des aventures d'Ambre (Ambre est
le personnage que le fou se crée à Terrilville). D'abord une
méprise, cela se transforme ensuite en mélodrame quand Fitz remet
en cause toute sa relation avec le Fou. Il doute, doute et doute
encore (« il avait lu tous mes journaux personnels, exigé un
compte-rendu détaillé de mes voyages, et je ne lui avais rien
refusé. Mais que m'avait-il donné en échange ? D'infimes
parcelles de lui-même, des énigmes et des devinettes »).
Dès
lors, après que Fitz ait cherché à tirer les vers du nez de son
ami qui aime tant son intimité, ils ne se parlent plus. Cela a des
conséquences extérieures à leur propre relation. Umbre en fait la
remarque à Fitz : « tu ne vaux pas une breloque
quand tu es dans cet état-là ».
On
peut regretter que Fitz fonce tête baissée mais le fou ne lui
facilite pas la tâche. Il ne comprend pas que Fitz soit tant
attachés aux apparences, au regard des gens (« les questions
que les autres peuvent se poser ne nous concernent pas »).
Il
y a bien entendu la question du sexe du Fou et de la sexualité entre
les deux. Fitz veut savoir s'il est un homme ou une femme, refuse de
comprendre que le Fou l'aime entièrement ; on peut ici faire un
retour en arrière lors de la recherche de Vérité quand le Fou se
demande si c'est un trou ou tuyau qu'on voit quand il pisse. En
outre, la sexualité et les rapports ont déjà été mis en doute
par Devoir, Astérie, des gardes royaux et Civil.
Même
quand Fitz manque de mourir après sa bagarre sanglante contre des
individus doués du Vif, ça ne s'arrange pas. Certes, il l'empêche
de mourir mais ça s'arrête là. Leurs échanges sont sans saveur,
froids.
Lors
de sa convalescence, Fitz a un échange très éclairant avec le
Fou :
Fitz
: T'est-il déjà arrivé d'éprouver de l'affection pour quelqu'un
et te rendre compte un jour qu'au fond tu n'apprécies guère sa
nature ?
Le
Fou : Je trouve curieux que ce soit à moi que tu poses cette
question.
Finalement,
à l'initiative de Fitz, la réconciliation se fait : « cesse
cette comédie et sois toi-même. C'est tout ce que je demande. »
Les
deux sont à nouveau réunis, ils vont pouvoir se lancer dans un de
leurs plus grands défis : libérer le dragon sur Aslevjal,
l'île où le Fou annonce qu'il va mourir. Bien entendu, Fitz
s'affole, panique et prend des mesures radicales pour l'empêcher d'y
aller.
On
a alors une scène qui nous rappelle fortement un passage de la Nef
du crépuscule, juste avant la mort du roi Subtil. Le Fou avait alors
repéré Fitz caché derrière un rideau et accroché son regard ;
ici, il fait de même sur un balcon alors qu'il fait noir.
Lors
d'une séance d'Art, Lourd nous montre la force du lien qui unit les
deux amis (« le petit homme se retourna et posa sur le fou un
regard curieusement évaluateur qu'il transféra ensuite sur moi »).
Quelle
est la surprise du Fitz quand il se rend compte que le Fou l'attend à
Aslevjal ! Celui-ci lui fait des reproches, manifeste son
incompréhension quant à la volonté du bâtard de l'empêcher de
faire face à son destin (« … mais jamais je ne me suis
opposé à ta volonté de courir ces risques »).
Plus
tard, le Fou et le Fitz sont capturés par la Femme Pâle qui va
tenir des propos qui vont jeter la suspicion sur le Fou. Elle affirme
qu' « il danse aux frontières de votre compréhension et
vous jette parfois d'infimes indices sur sa véritable nature, comme
on jette de petits morceaux de sucre à un chien ». Fitz ne
peut qu'acquiescer (« la cruelle exactitude de sa description
du fou »).
Le
Fou meurt. Fitz le ressuscite.
Fitz
va chercher son corps dans le palais de la Femme Pâle et il finit
par tomber sur elle, sans mains. Elle lui jette à la figure une
dernière révélation avec la volonté de le blesser : « tu
ne connais sans doute pas les coutumes de son peuple d'origine,
l'échange des noms en signe des liens que les gens forment pour la
vie ? »
Mais,
le sauvetage du Fou le pousse dans un futur inconnu, où il se sent
perdu et sans repères. Et des grandes décisions vont être prises.
Déjà,
il rend à Fitz tous les souvenirs et toutes les émotions que
celui-ci avait versés dans la Femme-au-Dragon, lors du réveil des
dragons de pierre (voir la Reine Solitaire).
Ensuite,
il décide de partir avec Prilkop (l'Homme Noir) vers son pays natal.
Et pour cela, il faut couper tous les ponts et liens. Fitz voit
dorénavant le Fou comme tous les autres (« je le voyais mais
ne le sentais plus, ni par le Vif, ni par l'Art, ni par l'odorat.
Plus de fou. Mon ami d'enfance, mon compagnon d'adolescence avait
disparu. ») Seule consolation pour le Fou, Fitz manifeste sa
volonté de retrouver Molly (quoique dans un premier temps, il avait
pensé suivre le Fou).
Leurs
adieux sont incomplets, le Fitz étant prisonnier dans le courant
d'Art. Le Fou lui laisse une petite statue qui s'anime quand Fitz la
prend en main. Le tome treize (Adieux et retrouvailles) se termine
sur ces mots : « je sais que je ne connaîtrai nul
autre semblable à eux, et je mesure le bonheur dont j'ai été
gratifié par leur présence « .
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