« FitzChevalerie
Loinvoyant (…) trop longtemps vous avez marché parmi nous déguisé,
privé de votre nom et de votre honneur. Relevez-vous, tournez-vous
et faites face au peuple des Six-Duchés, votre peuple, et soyez le
bienvenu enfin chez vous ».
Quel
plaisir cela a été de lire ces paroles du Roi Devoir dans En quête
de vengeance ! Enfin ! Enfin, Fitz est reconnu à sa juste
valeur et des décennies après sa mort dans les cachots de Royal, il
revient à la vie. La scène est encore plus magnifiée par la
chanson de la ménestrelle Astérie. Fitz occupe une place importante
dans l'histoire des Six-Duchés ; certes, il a favorisé la mort
d'un Roi (Royal) mais il a participé à la victoire contre les
Pirates Rouges, il a réglé des problèmes au niveau des duchés, il
a sauvé la vie de Devoir et favorisé son mariage, il a modifié la
donne géopolitique en réintroduisant les Dragons, il a permis à
Vérité d'épouser Kettricken et ainsi de suite.
Et
c'est significatif de les entendre dans la bouche d'un Roi que Fitz a
malmené lors de leurs premières rencontres.
A
la fin de la première trilogie, Fitz est le seul Loinvoyant adulte
survivant et en état de gouverner (mis à part Umbre) : Subtil,
Vérité et Royal sont morts, Auguste en incapacité. Dans la Tawny
Man Trilogy, c'est un basculement total : il n'est plus
assassin, ni même un jeune noble, non il devient un simple
serviteur. Tous ses actes de bravoure lui permettront juste
d'accompagner Devoir dans sa quête de la tête du dragon. Mais, il
est encore et toujours au service des autres. Si pour la masse il
n'est qu'un homme parmi d'autres, ses proches mesurent sa juste
valeur. Il est le Catalyseur du Fou, le Roi légitime pour
Kettricken, le mentor de Devoir. D'ailleurs, on pourrait penser qu'il
n'a pas conscience de ses rôles ou qu'il refuse de les assumer.
Dans
le tome Adieux et retrouvailles, Umbre se voit petit à petit
dépouiller de son pouvoir par le Roi Devoir, et dans une moindre
mesure par Kettricken. Lors d'une joute verbale entre la Reine des
Montages et Umbre, Fitz prend le parti de la première nommée. Et
contre toute attente, Umbre se soumet et reconnaît l'autorité de
Fitz : « Je dois obéissance au Roi Fitz ».
Les
paroles du vieil homme ont sans aucun doute constitué un réel choc
pour Fitz qui s'est souvent considéré comme un bâtard Loinvoyant
et non un réel membre de la famille. Dès le tome 2 (l'Assassin du
Roi), il ose dire à l'épouse de Chevalerie (Patience) que « je
ne suis pas le fils légitime du Prince Chevalerie, madame, mais
seulement le bâtard de votre épouse ».
Toutefois,
Fitz a le don se mettre dans des situations qui demandent l'action
des Loinvoyant. C'est comme si les événements le forçaient à
exercer une autorité, à user de son pouvoir et de son influence. Il
y a par exemple cette proposition de coup d’État du duc Brondy :
il s'agit plus ou moins de contester l'autorité du futur Roi Royal.
Quand il fait un rapport à Umbre, celui-ci est scandalisé qu'il se
retrouve pris dans de telles manœuvres et lui rappelle que « toi
et moi avons juré allégeance à la lignée des Loinvoyant, dont
nous ne sommes que des pousses adventices ». Ce qu'Umbre dit de
façon diplomatique, Royal le clame sans embarras, sans manières.
Une fois de plus selon lui, Fitz a mis son nez là où il ne devait
pas le mettre. Il lui en fait la remarque et les mots sont cinglants,
insultants (« toi qui te donnes le nom de FitzChevalerie
Loinvoyant, il te suffit de te gratter un peu pour trouver Personne,
le garçon de chenil »).
A
la fin de la Nef du crépuscule, Subtil est mort, Royal sur le trône,
Vérité on ne sait où et Fitz est tué puis ressuscité grâce à
la magie du Vif. Il lui est impossible de revenir à Castelcerf et il
doit trouver un nouveau but à sa vie. Finalement, il se lancera à
la recherche de son ami (Vérité) mais aura dû abandonné
beaucoup : « disparus, les rythmes des vies qui se
mêlaient à la mienne, des amis moururent, d'autres se marièrent,
les enfants naquirent, ils devinrent des hommes et de tout cela je ne
vis rien ». Fitz était mort. Pourtant, le bâtard royal était
assez aimé des gens du commun : des soldats avec qui il se
battait aux gens du Château. Certains voyaient en lui un ami,
d'autres un compagnon de bataille (ou de bagarre), d'autres un petit
garçon abandonné par son père et sa mère.
Astérie,
elle, voit en lui un héros. Astérie perce très vite son secret
quant à sa réelle identité. Lors du voyage en caravane vers
Lac-Bleu, elle fait le rapprochement entre le prétendu berger et le
bâtard royal. C'est elle qui trouve les mots (« mon frère me
l'a racontée et je vous décris tel qu'il vous a vu ; comme un
héros, vous lui avez sauvé la vie », à propos de la bataille
de l'île de l'Andouiller) qui apportent une certaine paix intérieure
à Fitz.
C'est
d'ailleurs ce côté héroïque mis en silence qui interpelle le
plus les quand ils apprennent son identité (si on met de côté son
lien avec le Vif). Longuemèche, son supérieur hiérarchique lors de
la quête de Glasfeu le Dragon, le prouve bien. Une fois que tout est
fini (le Dragon libéré, le secret de Fitz éventé), il
l'interroge, il ne comprend pas l'attitude de Fitz à vouloir à tout
prix rester dans l'ombre : « Vous méritez mieux. Tenez,
la gloire, les hommes qui savent vos exploits et les saluent à leur
juste valeur… Vous n'avez pas envie que vos actions restent gravées
dans les mémoires ? »
Ce
sera, en partie, chose faite des années plus tard...
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