Vérité.
Oncle de Fitz, frère de Chevalerie et Royal, fils de Subtil, Prince
puis Roi-Servant, Roi décédé, Dragon et Ancien.
A
la fin de la Reine solitaire, Vérité n'est plus. Il vient de se
transformer en Dragon de pierre pour sauver les Six-Duchés,
assaillis par les Pirates Rouges et proches d'une guerre civile.
Comment en est-il arrivé là ? Car, rien ne le prédisposait à
sauver le Royaume.
Vérité
n'a pas toujours été un sauveur, un homme entreprenant. Dans un
premier temps, c'est parmi les trois Loinvoyant développés (avec
Royal et Subtil) celui qui crève le moins l'écran. C'est Umbre qui
en parle le mieux ; deux citations illustrent le côté effacé
de Vérité :
-
« il n' a aucun intérêt pour les détails ; et par conséquent il n'a pas le génie de Chevalerie pour manier les gens ». On en vient à croire qu'Umbre douterait de sa capacité à monter sur le trône et assumer le poids de la fonction royale (d'autres seront encore plus explicites comme Mijote qui se demandera ce qu'il fait de ses journées enfermé dans une tour).
-
« quant à Vérité, c'est un bon soldat, mais il prête trop l'oreille à son père. Il a été élevé pour être le second, pas le premier. Il ne prend pas l'initiative ».
Sur
ce dernier point, Vérité est d'accord. Il se confiera plus tard à
Fitz, lui avouera que Chevalerie lui manque (« sais-tu comme il
est facile de suivre les ordres d'un homme en qui on a
confiance ? »). On pense qu'il est proche de baisser les
bras.
Tout
change au moment de son mariage arrangé (avec Kettricken) et à
distance dans les Montagnes. La rivalité entre Royal et Vérité
éclate au grand jour. Le premier intrigue pour placer ses proches et
faire disparaître le second mais il échoue et Vérité se rend
compte de la perfidie de son frère. A ce moment du récit, le
vocabulaire employé par Hobb se transforme radicalement :
« très fort », « d'une force animale »,
« comme un jardinier arrache une mauvaise herbe de la terre »,
« l'Art de Vérité tonnait comme un océan », « comme
un ours ». Le Roi-servant s'affirme.
La
haine entre les deux frères ne fera que monter en intensité. Royal
se croit supérieur grâce à sa mère (qui a un meilleur sang que la
mère de Vérité), se moque de son amour pour le peuple. La
confiance a disparu, les liens fraternels également, ils sont deux
rivaux. Pourtant, là où Royal se déchaîne sans retenue, Vérité
est plus mesuré car il est soucieux de l'équilibre du Royaume.
Une
autre relation importance est celle qui l'unit à sa femme. Dans un
premier temps, il refuse l'idée même de mariage. Il finit par se
soumettre, respectueux et obéissant, conscient de son rôle (« je
ferai comme vous le jugerez avisé, tel est le devoir d'un prince
envers son roi et son royaume »). Il épouse donc Kettricken et
a du mal à se faire à son caractère et même à la cerner, il la
trouve agitée et dissipée parfois, trop stricte à d'autres
moments, trop passionnée.
Quand
Kettricken se fait attaquer par des forgisés, il juge mal la
situation et la réprimande même en public. Mais, la Montagnarde a
tout anticipé et dans la séquence qui suit, Vérité est rejeté
dans l'ombre, éclipsé.
Puis,
son épouse cherche un moyen d'en finir avec les attaques des Pirates
Rouges et lui propose de partir à la quête des Anciens. Elle veut
même y aller mais Vérité finit par se ressaisir : « j'ai
appris de mes parents à faire passer les Six-Duchés avant moi. Je
m'y suis efforcé, mais je vois à présent que j'ai toujours envoyé
d'autres s'exposer à ma place ». En effet, reclus dans sa
tour, Vérité ne faisait qu'artiser. Il s'usait mentalement et
physiquement, vieillissant avant l'heure, perdant toute sa
musculature. Subtil le remarque d'ailleurs (« l'appétit de
l'Art est de ceux qui dévorent l'homme, pas de ceux qui le
nourrissent »).
Finalement, quand la bande (composée
de Kettricken, Astérie, Caudron, Fitz, Oeil-de-Nuit et le Fou)
parvient à trouver Vérité, Kettricken ne trouve aucun réconfort ;
Vérité apparaît presque forgisé, sans sentiments, hagard. Il
n'exprime aucune émotion devant la mort de son bébé, ne pense qu'à
son Dragon. Cruelle déception ! Mais, après un échange de
corps avec Fitz, il offrira une dernière nuit de passion à
Kettricken (et un fils).
C'est sans doute avec Fitz qu'il a
la relation la plus forte. Les deux ne se cachent rien.
Quand Fitz arrive à Castelcerf,
tout est nouveau pour lui et les moments passés avec les autres
membres de la famille royale sont très rares.
C'est à Vérité,
plus qu'à Subtil, qu'il donne sa confiance. Quand Chevalerie meurt,
Vérité lui rappelle qu'ils sont tous du même sang, de la même
famille (« il m'accorda un instant de parenté, mon oncle, et
je crois que cela changea pour toujours ma vision de lui »).
Petit à petit, les deux se
rapprochent, Fitz devient l'homme lige de Vérité. Quand Royal tente
de tuer son frère, c'est Fitz qui le sauve en étant prêt à se
sacrifier, de façon presque naïve : « Prenez tout;de
toute façon, je vais mourir. Et vous avez toujours été bon pour
moi quand j'étais enfant ».
Au retour des Montagnes, Fitz
effectue des missions périlleuses et quand il doute de ce qu'il
fait, c'est Vérité qui lui rappelle qu'il défend son honneur et
qu'il est un pion important. Il y a ce moment très fort quand Fitz
ne parvient pas à sauver une gamine des griffes et dents des
forgisés. Les soldats sont dégoûtés par ce qu'ils ont vus (les
corps), Burrich peine à se maîtriser mais c'est Vérité qui mettra
Fitz sur la bonne voie : « j'ai besoin de lui pour
cette immonde guerre secrète, car il est le seul qui soit équipé
et formé pour la mener, tout comme je monte dans ma tour et, sur les
ordres de mon père, je me consume l'esprit à me tuer de façon
sournoise et répugnante ». Voilà sans doute un moment-clé
qui a convaincu Vérité de la nécessité d'agir de son propre chef
et physiquement, il ne pouvait décemment laisser son neveu au bord
de la mort alors que lui est bien à l'abri au château.
Fitz meurt, Burrich et Umbre le font
revenir à la vie, Vérité a disparu dans les Montagnes. Le bâtard
décide donc d'aller tuer Royal mais se fait prendre au piège. Alors
qu'il décide de se suicider, Vérité apparaît à nouveau. Il lâche
un « Rejoins-moi », un cri de colère pour libérer Fitz
du joug des artiseurs, mais aussi le cri d'un homme qui en appelle un
autre à l'aide.
Dans la Reine solitaire, nous
trouvons plusieurs témoignages qui éclairent le caractère et la
personnalité de Vérité. Caudron, en quelques mots, résume tout :
« votre oncle ressent profondément ce qu'il vit; il a connu de
grands amours et une loyauté sans bornes. Parfois, je trouve mes
deux cents et quelques années d'existence bien pâles en
comparaison ».
C'est d'abord Tag, un soldat, qui
tombe sur Fitz dans une carrière, l'accule. Tout d'un coup, Vérité
arrive, sauve Fitz et se prépare à combattre l'homme quand celui-ci
dit : « je n'ai rien à craindre : le prince que je
servais n'aurait jamais tué un homme à genoux et sans arme. Je
pense que le roi agira de même ». Tout le long des romans, on
se rend compte que Vérité est très estimé de ses gardes et
soldats, qu'il a un solide passé militaire.
Ensuite,
Caudron nous montre une fois de plus à quel point Vérité tient à
Fitz et a conscience des peines de celui-ci. A un moment, Caudron et
Vérité sont dans une impasse pour animer le Dragon, il leur
suffirait de prendre Fitz pour régler le problème mais Vérité
refuse car « vous aimez trop votre vie et qu'il exclut de
la prendre, que vous avez déjà dû renoncer à trop de bonheurs
pour un roi qui ne vous a donné que des peineset
des épreuves en guise de remerciement. »
Les
adieux de Vérité à Fitz
ne feront que renforcer ce sentiment : « je t'aimais,
malgré tout ce que je t'ai fait subir, je t'aimais ». Les
derniers mots d'un homme qui s'est sacrifié pour sauver son peuple,
sa femme et son futur fils. Dès lors, il est un Dragon, un Ancien.
Il nettoie les Six-Duchés puis s'endort pour l'éternité.
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