Thanedd a laissé de graves et profondes blessures à Geralt. Il lui faut du temps pour se remettre et, pendant ce temps, Ciri s’éloigne de lui. Il la perd de vue. C’est Milva qui lui fournit des renseignements sur la jeune fille et qui, par la suite, avec d’autres dont Jaskier, Regis ou Cahir, va l’accompagner dans sa quête.
Milva n’adhère pas tout de suite aux objectifs de Geralt. Elle trouve sa conduite incompréhensible et dangereuse. Juste avant de s’en aller, Geralt exprime sa reconnaissance en employant des mots assez simples mais efficaces ; il dit qu’ « il se peut qu’un jour tu aies besoin d’aide. De soutien. D’une épaule sur laquelle t’appuyer. Appelle-moi alors, même en pleine nuit. Appelle et je viendrai ». Quand il dit ça, Geralt pense que son chemin va différer de celui de Milva. Or, Milva va décider de l’accompagner, sans doute par empathie en voyant son amour pour Ciri.
Si on comprend assez vite que Milva éprouve un certain respect pour Geralt, ce n’est pas le cas pour Jaskier. Il faut dire que le barde lui accorde bien peu de valeur, ne voyant en elle avant tout qu’une belle femme avec qui Geralt couche. Il taquine par exemple Geralt : « tu as le don, toi, Geralt, pour ce genre de rencontre. Svelte et bien roulée… Quand elle marche, on croirait qu’elle danse ». Milva trouve ce genre de commentaires assez réducteur. Ils mettent en avant son aspect physique alors qu’elle est bien plus qu’un simple corps : elle est une redoutable archère, elle sait chasser, elle a dû apprendre à lutter pour survivre.
Elle se moque même de Jaskier et de sa capacité à voir le monde à travers ses yeux d’homme plein de désir. On en a la démonstration quand Jaskier pense que certaines femmes peuvent se faire enlever un sein pour tirer à l’arc. Milva ne trouve pas cela uniquement hilarant mais aussi consternant de bêtise (« c’est bien une invention de poète, ça ! (…) Rien ne gêne la corde. C’est des fadaises, ces histoires de sein coupé, une invention tout droit sortie d’une caboche oisive obsédée par les tétons des femmes »). D’une certaine façon, elle se moque donc de la langue bien trop agile de Jaskier. Il faut noter qu’elle n’est pas la seule à se plaindre de la capacité à trop parler ou bavarder du chanteur.
Le long de leur route, Milva et les autres rencontrent la guerre. Ce sont parfois des combats livrés mais aussi des scènes vues et qui les révulsent. Ils voient des cadavres, des gens pendus, des femmes agressées et violées, des maisons brûlées… D’ailleurs, l’idée qu’une femme se fasse violer sous ses yeux la pousse à se plonger dans un combat désespéré. Et quand elle voit une femme quasiment crucifiée, elle livre une réflexion assez amère : « on prétend que la guerre est une affaire d’hommes, s’énerva Milva. Mais, ils n’auraient pas pitié d’une femme, il faut qu’ils s’amusent un peu. Et on appelle ça des héros… fils de chien ».
Habitué à tuer des animaux lors de chasse ou se battre, ayant déjà tué des personnes, Milva a une réaction surprenante quand elle pense avoir tué un individu quelconque : elle se met à vomir. Geralt pense que c’est le résultat d’une consommation d’alcool excessive la veille : « ce n’est pourtant pas une jeune fille délicate, sujette à ce genre d’émotion, marmonna-t-il. J’en attribuerais plutôt la faute à l’alcool de belladone qu’on a bu hier ». Geralt se trompe. En réalité, comme nous l’apprend Cahir, Milva est « enceinte ». On se rend vite compte que sa grossesse la dérange, que le simple fait d’en parler la dérange. Elle ne veut pas être un poids pour le groupe, elle ne veut pas qu’on se lamente sur son sort (« elle refusé, et ce de manière assez discourtoise, de me donner quelque date que ce soit, y compris celle de sa dernière menstruation »). Ceci dit, on peut comprendre que Mila n’ait pas donné un calendrier précis de ses règles à un homme qu’elle vient de rencontrer, même si les deux ont noué une relation de confiance.
Même si les membres du groupe sont prêts à la soutenir et à lui laisser du temps, Milva ne les associe pas à sa prise de décision. Elle a de toute façon déjà opté pour l’avortement et a demandé à Cahir une potion : « Milva a exigé que je lui prépare un certain… médicament qui agit de façon radicale. Elle estime que c’est le meilleur moyen pour régler tous ses soucis ».
Renonçant suite au soutien de Geralt et des autres, le destin jour un malgré tout à Milva. Elle est affaiblie lors d’une bataille (« Milva fut la dernière à quitter l’embarcation, ses mouvements étaient soudain devenus terriblement lents »). En réalité, elle est en train de perdre l’enfant qu’elle porte en faisant une fausse couche.
Milva traverse seule cette épreuve. Ce ne sont pas les autres qui se détournent d’elle mais elle qui se détourne d’eux. Jaskier est témoin de ce qui se passe. Dans ses mémoires, il écrit que « sur le plan physique, l’archère récupéra vite ; sur le plan psychique, en revanche, ce fut une autre histoire. Il arrivait que de l’aube au crépuscule elle ne dise mot. Elle aimait à disparaitre et à rester à l’écart, ce qui nous inquiétait tous »). Milva a donc eu besoin de temps et de solitude pour surmonter sa peine et son deuil, pour accepter ce qui lui est arrivé. Finissant par l’accepter, elle se coupe une mèche de cheveux et tourne la page, assez brutalement.
La brutalité a accompagné Milva à des moments déterminants de sa vie. Elle a résisté aux assauts de son beau-père qui tentait d’abuser d’elle sexuellement : « quand ma mère ne faisait pas attention, il essayait de me débaucher avec ses sales pattes. Il voulait rien entendre de ce que je disais ». Milva a alors tué son beau-père, volontairement ou non.
Toussaint montre une Milva touchée. Fringillla, une magicienne amante de Geralt, témoigne : « Milva, une jeune fille qui semble en apparence belliqueuse et arrogante, mais que j’ai eu l’occasion de surprendre à deux reprises, terrée dans un coin des écuries, en train de pleurer ». Il semble donc que, malgré les apparences, Milva pense toujours à sa fausse couche.
Milva se rend compte que le groupe perd son temps à Toussaint, que les membres stagnent et sont pris dans une fausse torpeur (« ça fait longtemps qu’on croupit, ici, moi j’vous l’dis ! Trop longtemps qu’on croupit ici à paresser. Ça nous abrutit »). Cette sensation touche aussi Milva, elle s’attendrit et se laisse séduire par un baron. Elle prend du bon temps avec lui en partageant des moments intimes. Pourtant, elle refuse de rester avec lui et de l’épouser (« il lui a demandé sa main, tout à fait officiellement et solennellement. Milva a refusé, assez brutalement »).
Puis, Milva connait une fin tragique et symbolique. Elle qui a si bien manié l’arc est tuée par une flèche. On avait eu une longue explication sur la façon dont la flèche devait traverser une proie pour la tuer proprement lors de notre première rencontre avec Milva ; c’est elle qui en fait les frais cette fois-ci. On lit que la flèche « avait atteint Milva au ventre, assez bas et était ressortie de l’autre côté, fracassant son bassin et dévastant ses boyaux et ses artères ».
Sa mort marque brutalement ses compagnons (« Geralt et Cahir poussèrent un cri simultané »). Quant à Angoulême, une jeune femme à la vie bien compliquée ayant rejoint le groupe et qui a noué une relation vache et intense avec Milva, elle exprime toute sa détresse : « Tantine, ne meurs paaaaas ! ». Hélas, Milva meurt. En pensant à son père, mort malade.
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