Défait par Royal, Fitz est battu physiquement et manque de se noyer. C'est Fouinot qui vient le sauver, en sacrifiant sa vie. Fitz vit là un nouveau traumatisme. Cela a un impact certain sur le jeune homme qui se rend compte, enfin, qu'il n'est qu'un pion dans le jeu du roi Subtil. Si les blessures sont en partie mentales, elles sont surtout physiques. Fitz perd de sa vigueur, de sa vitalité. Il perd possession de ses moyens physiques. Il a des crises de tremblements, des moments où son corps ne lui répond plus. Pour un assassin, c'est une tare. Fitz le vit donc mal et ce qui est une incapacité physique se transforme en apitoiement moral.
A vrai dire, Fitz est presque pathétique. Certes, Royal l'a dominé et il a frôlé la mort. Mais, il est étrange de le voir renoncer si fortement : « je suis fatigué, je suis épuisé. Je ne suis plus à la hauteur de ce qu'on attend de moi (…) Peu importe mon devoir, peu importe mon serment, je suis trop diminué pour tenir ma parole ». Cette attitude étonne ses proches. Voir Fitz si défaitiste les questionne. Ils ne comprennent pas pourquoi le jeune homme baisse les bras et est prêt à renoncer à sa vie. Burrich tente de le raisonner de différentes façons, notamment en employant un discours plus optimiste. Il lui rappelle que Fitz a des devoirs envers le trône ; Fitz n'entend pas cet argument. Il lui dit alors qu'il n'est mort, qu'il peut encore faire des choses (« tu n'es pas aveugle, tu n'es pas paralysé ; tu as encore toute ta tête. Cesse de te définir parce que tu ne peux pas faire. Vois plutôt ce que tu n'as perdu »). Bien entendu, Fitz n'est pas en état d'entendre ce genre de paroles. Il se ferme.
A ce moment du récit, Fitz est encore dans les Montagnes. La procession des Six-Duchés est repartie vers Castelcerf avec Royal et Kettricken alors que Fitz a décidé en arrière, officiellement pour guérir, officieusement pour se lamenter sur son sort. Burrich n'est pas le seul à tenter de le soigner ou de le remettre en état physique, Jonqui essaie aussi. Elle aussi se heurte à un mur, à un Fitz négatif, un Fitz qui semble refuser de faire des efforts (« guérir peut être long et fastidieux parfois, mais dire que vous ne pouvez pas continuer ainsi... Je ne comprends pas. Cela provient peut-être d'une différence entre nos langues ! ») Autrement dit, Burrich et Jonqui tentent de dire à Fitz que sa vie continue. Il ne peut plus faire un bon nombre de choses mais il peut encore faire certaines choses : il doit trouver sa voie.
Mais, rien ne change quand Fitz finit par retourner à Castelcerf. Il se lamente quand les autres ont des signes d'attention pour lui. Il prend cela comme une insulte, comme la preuve qu'il est un incapable. C'est par exemple le cas lorsque Pognes l'aide à prendre soin de son cheval. Fitz le prend mal et considère qu'on le prend pour un poids mort : « mais ce soir, il m'a traité comme un invalide... quelqu'un de tellement faible qu'on ne peut même plus l'insulter. Comme s'il était normal qu'il fasse les choses à ma place ».
Trembler complique la vie de Fitz. Cela pourrait avoir un impact sur sa capacité à manier l'épée ou préparer des poisons. Mais, en réalité, si il le vit aussi mal, c'est parce que c'est un signe de faiblesse, de défaite. C'est la preuve que Royal a été meilleur que lui et il ne tolère pas ça (« je ne supporterais pas qu'il me voie trembler de faiblesse ou m'écrouler subitement, pris de convulsions ; je ne veux pas le voir sourire de ce qu'il m'a fait, je ne veux pas le voir savourer sa victoire »). Fitz fait tout pour cacher sa faiblesse et il y parvient, surtout avec le temps qui passe : « mes mains se mirent à trembler ; je les posai sur la table et les serrai l'une contre l'autre pour les calmer. Je sentais toujours les spasmes qui les agitaient, mais au moins ma faiblesse n’était plus visible » et « je continuais à être parfois victime d'accès de tremblements, mais je faisais moins de crises et je m'arrangeais toujours pour regagner ma chambre avant de m'humilier et m'effondrer devant tout le monde ».
Si Fitz vit aussi mal son état, c'est aussi parce qu'il pense devoir renoncer à quelqu'un qu'il aime : Molly. Il anticipe sa réaction et se convainc qu'elle ne voudra plus de lui (« elle s'est déjà occupée d'un infirme, elle y a passé sa jeunesse, tout ça pour s'apercevoir qu'il ne lui avait laissé que des dettes. Et tu voudrais que j'aille la retrouver dans l'état où je suis ? ») Les faits lui donnent raison puisque Molly ne veut plus de lui. Mais, cela n'a rien à voir avec son infirmité mais c'est plus la conséquence d'un malentendu. Quand elle finit par voir Fitz au château, Fitz pue le vin et Molly ne supporte pas ça (« je sais que je ne serai jamais la femme d'un ivrogne. Je crois même que j'ai pas envie d'être l'amie d'un ivrogne »).
Une autre personne que Fitz apprécie énormément est le Fou. A ce moment du récit, les deux commencent à nouer des liens forts. Le Fou commence à prendre une place importante dans la vie du bâtard royal. Avoir un moment de faiblesse devant lui l'effraie : « je me mis à trembler, mes dents à claquer, les lucioles à étinceler à la lisière de mon champ de vision. Une crise ! J'allais avoir une crise, et devant le fou ! »
L'état physique de Fitz est remarqué par ses amis. Patience le constate (« tu es épuisé et plus qu'à demi malade, va te coucher ») et s'en inquiète tout comme Brodette (« Brodette me raccompagna à la porte, d'où elle me suivit d'un œil inquiet jusqu'à ce que je fusse au palier »). Umbre, lui, est plus direct. Bien qu'inquiet, il conseille Fitz avec son œil d'assassin. Il le pousse à avoir plus d'activité physique et de cesser de se lamenter. Surtout, il tente de lui retirer la peur qui le paralyse : Fitz ne peut pas comporter comme s'il était une proie ; ainsi quand il se croit à nouveau empoissonné par Royal, Fitz croit voir des signes annonciateurs et se met à suer et transpirer ; Umbre le remet à sa place : « cesse, fit Umbre sans élever le ton. C'est toi qui te crées ces réactions, Fitz ».
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