Les romans du Fou et de l’Assassin concluent les aventures des personnages que nous avons suivi dans l’Assassin royal, les Aventuriers de la mer ou les Cités des Anciens. S’ils font apparaître des personnages déjà connus, ce n’est pas le cas de tous. Ainsi, Fitz et Molly ont un nouvel enfant, Abeille. Celle-ci sera au centre des événements lorsqu’elle se fera capturer par un groupe de mercenaires de Chalcède, mené par Dwalia. Dwalia, qui a connu le Fou à Clerres, obéit aux Quatre et a pour mission de remettre l’histoire dans le bon chemin. Pour cela, elle cherche le fils inattendu, traque le Fou. Avec Dwalia, nous découvrons une nouvelle culture basée sur l’obéissance, la torture et l’exploitation des renseignements et des rêves ; c’est un monde où tout doit favoriser l’opulence et le pouvoir des Quatre. Nous comprenons également que ces individus ont tout fait pour chasser les Anciens et les Dragons, et que leur retour ne les ravit pas.
Dwalia terrorise Abeille après l’avoir enlevée, elle lui fait peur, Abeille la craint. Pour comprendre Dwalia, il faut savoir qui elle est et ce qui la motive. Pour cela, on peut s’appuyer sur les dires du Fou qui connaît bien Clerres et son mode de fonctionnement. Il nous apprend que « c’est une Lingstra, c’est-à-dire une sorte d’émissaire, on la dépêche ici ou là pour chercher des renseignements, ou donner un coup de pouce aux événements pour leur faire suivre la direction décidée par les Serviteurs ». On retrouve bien là le côté manipulation. Le Fou prévient Fitz, il ne faut avoir aucune pitié pour Dwalia, elle n’est pas qu’un outil, elle a conscience de ce qu’elle fait et elle y prend grand plaisir. Les gens de Clerres savent qu’ils sont égoïstes, que toutes leurs actions ont pour but de satisfaire leurs intérêts et tant pis si d’autres doivent grandement en souffrir : « si tu tombes sur ceux qui ont enlevé Abeille (…) ceux qui ont conçu ce plan, les luriks et Dwalia, ils te paraîtront peut-être bienveillants, jeunes, mal conseillés (…) Ne t’y fie pas, ne les écoute pas ; n’aie aucune compassion, aucune pitié (…) chacun d’eux a été témoin de ce que les Serviteurs font à leurs semblables ; et chacun d’eux a choisi de servir plutôt que de les défier ». Il n’y a pas d’innocents à Clerres, ce ne sont pas des gens forgisés. C’est Abeille qui nous fournit quelques renseignements supplémentaires en pénétrant l’esprit d’un de ses gardes. Elle y lit que Dwalia « était jadis respectée en tant que servante à la disposition d’une Blanche hautement considérée ; elle avait vu sa maîtresse envoyée accomplir de grandes choses dans le monde. Mais lorsque la femme avait échoué et chu, la fortune de Dwalia avait péri avec elle ». Cette Blanche est la Femme Pâle (ou Ilistore) et c’est bien entendu les actions du Fou et du Fitz qui ont contrarié ses plans. Il y a donc un aspect personnel aux actions de Dwalia, elle veut se venger du tort causé par le faux Prophète Blanc et son catalyseur.
Dwalia aimait sans aucun doute Ilistore, elle avait lié son destin à elle. Reppin, un garde de Clerres, dit de ne pas oublier que « Dwalia a servi Ilistore pendant des années et qu’elle le vénérait ; elle affirmait toujours qu’à son retour Ilistore la porterait au pinacle ». Il y a donc à la fois un sentiment affectif et la promesse d’une ascension dans la hiérarchie. Dwalia n’a absolument pas digéré la mort de la Femme Pâle à Aslevjal et cela lui fait parler sans discernement aux Quatre (« Disparus notre Femme Pâle, notre belle Ilistore et Kebal Paincru ») ; cela lui causera d’ailleurs des soucis. Elle s’en veut de ne pas l’avoir accompagnée mais elle devait obéir aux ordres. On le lui a interdit et depuis elle n’a que des regrets (« je t’ai suppliée de me laisser partir avec Ilistore pour la protéger (…) elle est morte de façon horrible, seule, brisée, glacée »).
Dwalia accuse donc le Fou de la mort de sa chère Ilistore. Le contentieux remonte à bien avant. Elle reproche au Fou (Bien-Aimé) de ne pas savoir rester à sa place, d’être parti dans les Six-Duchés, loin au nord, pour modifier l’histoire. Elle rumine : « tout est sa faute. C’est à cause de lui que nous en sommes là. Il ne se satisfait pas du rôle qu’on lui avait donné ». Heureusement pour elle, après avoir permis de sauver Glasfeu, le Fou décide de retourner à Clerres avec l’espoir fou de changer les choses là-bas. C’est une mauvaise décision car il tombe sur Dwalia qui le torture, le frappe, l’insulte, le rabaisse (« ça m’était égal qu’il réponde ou non ! Je l’interrogeais, et il hurlait ; alors je serrais de nouveau »). Cela a été efficace car même Fitz, son plus proche ami, n’a pu le reconnaître tant il était changé.
Lorsque Dwalia décide d’enlever le fils inattendu (Abeille selon elle), elle embauche des mercenaires de Chalcède. Mais, la cohabitation n’est pas facile avec ces gens qui n’ont aucun respect pour les femmes. Ellik, le chef du groupe de mercenaires, est rapidement menaçant (« tes jolis cheveux blancs pourrait bien me rapporter plus que tes servantes exsangues et tes hommes débiles »). Ellik et ses hommes ont violé des femmes à Flétribois. Ce sont aussi des hommes capables de chasser et se procurer de la viande : la bonne odeur donne de la viande qui cuit donne envie à Abeille et à d’autres de leur demander de quoi se nourrir. Dwalia les met en garde : « une part de cette viande nous reviendrait à un prix qu’aucun d’entre nous n’est prêt à payer ».
Ellik et Dwalia se disputent le leadership au sein du groupe. La femme de Clerres a un avantage grâce à la magie de Vindeliar qui leur permet de se déplacer librement et secrètement dans les Six-Duchés. Mais, Ellik montre les dents : « il est encore plus utile qu’une femme prête à se faire violer ».
Plus tard, Fitz parvient à capturer un chalcédien et l’interroge. Cela nous apprend que Dwalia a été la source de bien des fantasmes et été proche d’être violée : « je n’ai pas pu m’empêcher de rire en la voyant se débattre entre eux, avec ses gros seins et son ventre rond qui dansaient comme de la gelée. Je lui dis que je pensais pouvoir lui prouver que nous étions bien des hommes. Nous avons commencé à la déshabiller et alors... » Ce qui sauve Dwalia (et pas la pauvre Odessa, déjà violée) est la peur de Vindeliar qui irradie sur tous. Eux voyaient Vindeliar comme un jeune homme puceau, ils ne se rendent pas compte qu’à ce stade du récit, il n’est qu’une créature exploitée par Dwalia. Ils ne peuvent pas non plus savoir qu’Odessa est la sœur de Vindeliar…
Malgré tout, Dwalia devra quand même donner son corps pour arriver à Clerres. Quand il faut franchir la mer, le petit groupe embarque à bord d’un bateau et Vindeliar implante dans l’esprit du capitaine que Dwalia est la plus belle femme au monde. Il la met donc dans son lit et lui fait l’amour à tout instant (« les moments où le capitaine Dorfel s’occupait de Dwalia étaient les plus tranquilles de mon existence limitée. Elle poussait à présent de petits cris aigus, à peine audibles à travers le solide panneau de bois »).
De retour à Clerres, convaincue d’avoir ramené le fils inattendu, tout ne se passe pas comme prévu pour Dwalia. On peut déjà douter du fait qu’Abeille soit bien le fils inattendu : ne serait-ce pas plutôt Fitz ? Surtout, elle prend une volée de reproches de la part des Quatre (Capra, Coultrie, Symphe et Fellodi). Capra est claire en pointant du doigt que la mission de Dwalia était avant tout personnelle et intéressée (« oh, certes, tu as manipulé les événements, mais ta petite vengeance nous a projetés dans une situation très dangereuse »). On ne peut être que d’accord avec ce que dit Capra car l’enlèvement de la fille de Fitz a créé une alliance à l’autre bout du monde : des forces des Six-Duchés (Fitz, Lant par exemple) se sont alliés à des Dragons, des vivenefs, des Marchands (Brashen, Althéa), des Anciens (Kanaï) pour détruire Clerres et récupérer Abeille si possible. Et les Quatre comme Dwalia sous-estiment Abeille et sa capacité de nuisance et de dégâts : ils le paieront chèrement.
Dwalia fait donc son rapport et elle emploie un ton colérique et hautain. Cela déplaît aux Quatre qui décident de la punir : « ce ne furent pas dix coups de fouet, mais quarante, dix décrétés par chacun des Quatre (…) Avant qu’ils eussent fini, les lanières frappaient sa chair à vif et faisaient jaillir des gouttes de sang ». Dwalia sera tuée par Abeille grâce à l’Art. Même morte, son cadavre et son corps ne connaîtront pas la paix (« Ferb et moi, on a eu l’honneur de balancer Dwalia dans la fosse, et Ferb lui a pissé dessus. Cette vieille garce était plus jolie morte »). Cela montre bien que Dwalia était très peu respectée à Clerres : on ne note aucun enthousiasme à son retour de mission de longs mois après son départ, on ne cesse de lui répéter toutes les pertes.
Car Dwalia est antipathique. Elle a livré à la mort et au viol des dizaines de gens simplement pour enlever Abeille. Elle a souvent battu sa captive (« Dwalia avait laissé sa marque sur moi : par temps froid et humide, ma pommette gauche me faisait souffrir »). Elle n’a montré aucune solidarité envers ses propres compagnons de voyage, laissant par exemple Alaria se faire abuser quand ils sont coincés dans un poteau d’Art à Chalcède : « il n’en a place, alors ne fais pas attention à lui. Il ne peut pas baisser son pantalon, et le tien non plus » ; ce qui n’empêchera pas l’homme de se frotter à Alaria. Notons qu’elle vendra plus tard Alaria contre des places sur un bateau.
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