Oeil-de-Nuit est le réel Roi. Le Fou versus la Femme Pâle : le combat du siècle. Oh Malta, Malta, Malta. Gloire au dragon fou Glasfeu. Les Anciens ne sont que des gosses. Keffria, tu remontes dans notre estime. Il était une fois Clerres.

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Il existe des personnages qui paraissent anodins et qui ont un grand impact sur l’histoire. Il existe des personnages qui accomplissent des ...

samedi 2 septembre 2017

Umbre, leçons de loyauté et de royauté

Frère du roi Subtil, Umbre est un des maîtres de Fitz. Assassin discret, conseiller diplomatique, homme aux multiples identités et curieux, il va dispenser de nombreuses leçons au bâtard royal et devra même les répéter plusieurs fois tant celui-ci est têtu.

Très tôt dans la trilogie, Umbre met en garde Fitz et l'informe de son rôle. Car Fitz a un statut particulier : certes, il est le fils d'un prince mais il n'est pas légitime. D’ailleurs, Fitz devrait en avoir conscience, il a entendu les paroles de Royal lors de sa visite à OeildeLune et les reproches formulés par la reine Désir (Royal devrait être tout en haut dans la ligne de succession). Umbre lui dit donc que « tant que tu ne manifesteras pas d'ambitions inopportunes, tout ira bien pour toi (…) ». Il lui précise également que «  nous appartenons au roi, mon garçon ; à lui exclusivement, d'une façon à laquelle tu n'as peut-être pas encore réfléchi ». Il convient de préciser que les difficultés de Fitz à rester à sa place ne viennent pas essentiellement d'un caractère obstiné mais aussi du fait qu'il n'est qu'un enfant quand commence sa formation.

Ce n'est qu'un meurtrier, un tueur, rien de plus. Pour Umbre, il n'y a pas de noblesse à faire ce qu'ils font, pas d'élévation morale, pas de grandeur à acquérir ; Fitz ne doit surtout pas se faire des idées (« ne cherche jamais à te croire autre chose que ce tu es, tout comme moi : un assassin. Nous ne sommes pas les agents miséricordieux d'un roi plein de sagesse mais des assassins politiques qui donnent la mort pour permettre à notre monarchie de se maintenir. ») Il ne s'agit pas d'être bon ou de livrer des duels en public mais de tuer discrètement, dans l'ombre.

Et ce statut d'assassin doit être pleinement assumé et devenir le seul véritable costume. L'alternative n'existe pas. Plus que devenir un assassin, c'est l'existence entière de Fitz qui lui échappe et c'est ce message qu'Umbre aura le plus de mal à faire entrer dans sa tête (et Fitz, dans celle de Molly ou Oeil-de-Nuit). Umbre lui fait une sévère mise au point au retour des Montages : il doit cesser de voir Molly ! Les mots employés sont secs, sans doute choisis pour marquer Fitz et le remettre sur le chemin (ce qui ne fonctionnera pas) : « t'imaginais-tu pouvoir mener deux existences ? Nous appartenons au roi (…) nos vies sont à lui, chaque instant de chaque journée, que nos soyons éveillés ou endormis. Tu n'as pas de temps à consacrer à tes soucis personnels. » Ce sont des conseils que Fitz n'écoutera pas et qui lui joueront des tours lorsque les intrigues politiques se mêleront à ses soucis amoureux.

Nombreux sont ceux qui soulignent à Fitz sa condition de bâtard, Umbre en fait partie. On peut même trouver un écho avec des paroles de Royal (« tu es le misérable bâtard d'un petit prince qui n'a pas eu le courage de devenir roi-servant »). Si beaucoup utilisent le terme de bâtard comme une insulte, Umbre n'oublie pas qu'être prince (ou fils légitime de prince) engendre des responsabilités et la possibilité de faire des choix (ce qui n'est donc pas le cas de Fitz). On a ainsi pu lire à maintes reprises que Fitz n'est qu'un outil, pas autre chose. Et s'il n'est qu'un outil, c'est que son père a tourné le dos à ses devoirs et l'a privé de la possibilité d'être autre chose (« tu es le rejeton illégitime d'un homme qui a refusé de devenir roi, qui a abdiqué. Et, par cette abdication, il s'est déchargé de la nécessité de porter des jugements »).
Malheureusement, Fitz aime provoquer le changements, se jeter sans réfléchir dans la bataille, c'est un catalyseur comme le dit si bien le Fou. C'est un des plus gros reproches que lui fera Umbre après sa crise de colère (Le poison de la vengeance) envers Umbre : « quand tu joues de ta propre initiative, tu mets toute autre stratégie en porte-à-faux et les autres pions en danger. »

Umbre a de profondes et solides attaches pour les Six-Duchés. Quand les Pirates Rouges commencent à livrer leur guerre, il a bien conscience de la précarité du royaume et de la maigreur de ses défenses. Il en fait la remarque à Fitz : «  Et le royaume défaille, car chaque bourg devant décider seul, il se sépare du tout (…) tout ce que le roi pourrait faire dans la situation présente vaudrait mieux que cette satanée indécision ». On pourrait être étonné de le voir critiquer le roi Subtil mais on comprendra plus tard que c'est plus qu'une affaire de personnes.
Fitz pense à se lancer dans une petite vendetta personnelle contre les empoisonneurs de Subtil mais Umbre lui remet à l'esprit ses devoirs, ce pour quoi il existe et les raisons de sa formation d'assassin ; « tout est affaire de foi, mon garçon. Crois-tu en ton roi ? Attends, ton roi, ce doit être plus que le brave vieux Subtil ou le gentil Vérité (…) ce doit être le roi, le cœur du royaume, le moyeu de la roue ; alors, et si tu es convaincu que les Six-Duchés valent d'être préservés, qu'on peut faire le bien du peuple en dispensant la justice du roi, eh bien, telle est la différence ». On voit qu'il a longuement réfléchi aux équilibres, du royaume, à ce qui maintient son unité. Il fait également preuve de considération et montre de l'importance pour les habitants même si il ne les gouverne pas officiellement et que ceux-ci n'ont aucune idée de son existence. Il n'attend ni reconnaissance ni applaudissements. On en a l'illustration lorsqu'il arrive à Forge et voit ce qui s'est déroulé (la destruction de la ville par les Pirates Rouges) : « ce sentiment que ces gens ne font qu'un avec toi, que leur catastrophe est ton échec personnel. Tout ça te viendra les années passant. C'est dans le sang ».

Et comme Fitz, on est frappé en pleine face en lisant ses exclamations après la révélation de Kettricken (attaquée par les forgisés, la reine décide de leur offrir une mort propre et adresse un fort discours à son peuple). Il sent en elle les prémices d'une future grande reine, d'une personne qui aime réellement son peuple, qui pourra les guider en ces temps difficiles et qui n'a pas encore été salie par les calculs politiques (« nous n'avions plus de gouvernail, les vagues nous ballottaient, nous martelaient et les vents nous poussaient à leur gré »). Fitz fait alors un commentaire qui montre à quel point Umbre avait été heurté par les difficultés (« je compris alors que son effervescence était en réalité la crête d'une lame de fureur et de chagrin »).

Servir son royaume implique d'être prêt à tout. On a vu que Fitz avait été amené à tuer, il doit aussi penser à devoir donner sa propre vie. Ce sont les mots qu'il entend de la bouche de son mentor (« toi, moi, même Vérité s'il le jugeait nécessaire pour la survie du royaume »). D'ailleurs, en quelque sorte, les trois auront été sacrifiés par Subtil : Umbre devant vivre en reclus, Vérité perdu dans sa guerre d'Art et envoyé chercher les Anciens.
Faire des choix implique de devoir les respecter et aussi renoncer à des possibilités. Tout n'est pas permis quand on est roi ou prince et les fautes se paient. C'est ce qui est arrivé à Chevalerie ; ou plutôt c'est la punition qu'il s'est infligé lui-même. Umbre avertit Fitz qu'il ne verra jamais son père revenir au pouvoir ou au château royal («  même si le peuple entier le voulait, je doute qu'il aille à l'encontre du destin qu'il s'est forgé ou des désirs du roi »).

Et, cela peut aussi être des sacrifices qui dépassent sa propre personne. On peut illustrer ceci avec Ortie, la fille de Fitz et Molly : quand Fitz finit par se rendre dans les Montagnes pour retrouver Vérité, il tombe en chemin sur Umbre, Kettricken et les autres. Umbre lui rappelle qu'il est toujours lié par son serment d'allégeance et que dans ce cas-là, c'est Ortie qui doit être utilisé, qui doit devenir l'outil (« je ferai tout pour remettre un véritable Loinvoyant sur le trône des Six-Duchés ») ; on a aussi à ce moment une prise de conscience de Fitz à propos de la façon dont Umbre le considère (« sa foi en moi était telle qu'il n'hésiterait pas à me plonger au cœur de n'importe quelle bataille, à exiger de moi n'importe quel sacrifice »).



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