Le
Puits d’Argent conclut la saga des Cités des Anciens. Elle est la
suite des Aventurier de la Mer et elle introduit de nouveaux
personnages : des gardiens, des serpents et des dragons, des nobles,
des marchands, des chalcèdiens, des vivenefs… Géographiquement,
l’action se situe le long du désert des Pluies et de son fleuve
puisque nous suivons un groupe de jeunes gens sans avenir chargés de
trouver un nouvel endroit aux dragons (la mythique cité Kelsingra).
Ceux-ci ont éclos, mal formés, incomplets et incapables de se
nourrir. Ils sont vus comme un fardeau à éloigner.
Enfin,
chronologiquement, elle poursuit les développements géopolitiques
qui se sont déroulés lors des Aventuriers de la Mer et de
l’Assassin Royal. Elle offre une conclusion, temporaire, aux
aventures de Tintaglia (de nouveaux éléments seront rapportés lors
de la trilogie du Fou et de l’assassin).
Au
début de ce tome, Tintaglia est gravement blessée par des pirates
et seul un miracle peut la sauver (de l’Argent).
Une
partie de la saga montre l’affirmation et la transformation d’une
jeune noble, Alise. Celle-ci est passionnée par les dragons et est
prête à tout pour les approcher et les étudier. Après un mariage
malheureux et de longues négociations avec son mari, elle embarque
sur un navire marchand (où elle trouve d’ailleurs l’amour).
Mais, malheureusement pour elle, elle est poursuivie par son ancien
mari aux motivations claires : il cherche de l’argent pour
assouvir ses plaisirs (charnels et autres) et si il peut à la fois
la mater et récupérer son ancien amant il ne s’en privera pas (il
avait collé Sédric comme chien de garde de sa femme).
Hest
apparaît hautain et imbu, il pense que le monde tourne autour de lui
et que son charme suffit à amadouer et manipuler les gens (« Hest
en était certain, Sédric reviendrait toujours auprès de lui »).
Quand il finit par retrouver Alise et son nouveau mari, il ne pense
qu’à détruire leur histoire en lançant les pires accusations et
en l’humiliant publiquement. Il veut profiter de la culture des
Marchands et de l’importance des accords conclus, ici de mariage.
Il affirme publiquement qu’Alise lui appartient. Il est persuadé
que tout ira dans son sens et c’est pour ça qu’il est surpris
quand Sédric, si docile, s’oppose à lui : « j’étais
ton amant, Hest, je participais à ton entreprise de duplicité et je
ne m’interposais pas quand tu te moquais d’elle (…) tu étais
un mari infidèle et moi un ami félon. »
Précisons
que Hest est capturé par les gardiens puis transporté à Kelsingra.
Il était sur l’embarcation quand les mercenaires de Chalcède ont
attaqué Tintaglia et il doit subir la justice des dragons. Le jeune
noble fait face donc aux dragons et se rend compte de leur grandeur
(« mesura tout à coup la majesté et la puissance des dragons,
et il tomba à genoux en pleurant d’avoir osé défier de si
magnifiques créatures ».
Mais,
à Kelsingra, malgré son emprisonnement, il retombe vite dans ses
travers et use de son charme pour amadouer un garde et tenter de se
libérer. Dans sa folie d’évasion, il tente même de s’approprier
un dragon et de le nommer… Les choses se termineront mal pour lui
car Kolo, un dragon, croisera sa route : « je pense que je
vais t’appeler Viande »…
Bien
entendu, l’histoire tourne essentiellement autour des dragons, des
gardiens en passe de devenir des Anciens, et des Anciens déjà
existants (comme Malta). Les dragons et les humains s’influencent
les uns les autres, Alise le sent (« si nous vivons à
proximité des dragons et des Anciens, nous changerons nous aussi »).
Quand
les gardiens arrivent à Kelsingra, ils se mettent à fouiller la
cité antique et ses pierres de mémoire. Kanaï occupe alors un
premier plan, il est celui qui explore et qui tente de faire adopter
aux autres les anciennes lois. Par exemple, quand les chalcèdiens et
autres sont capturés et emprisonnés à Kelsingra, il opte pour
qu’ils soient exécutés car « c’est comme ça depuis
toujours, la mort pour celui qui attaque un dragon, non ? »
Enfin,
les humains sont fascinés par les dragons.Leurs esprits, à de rares
exceptions, ne peuvent résister au charme des dragons ; ils
sont fascinés, et d’autant plus qu’ils font face à de terribles
prédateurs qui peuvent les dévorer d’un coup de dents ou les
empoisonner. Les dragons ont conscience de leur supériorité sur les
humains et pour eux c’est même l’ordre naturel des choses. Quand
Malta affirme que « la plus belle des reines vole ! »,
Tintaglia (qui se remet de terrible blessures) répond simplement que
« ta description est exacte ».
Dans
la dernière partie du roman, il est question de vengeance. Tintaglia
ayant été attaquée par Chalcède (le duc cherche à se procurer du
sang de dragon car il sait que le liquide a des propriétés
surprenantes).
C’est
alors l’occasion de retrouver Selden qui est prisonnier et victime
de traitements abjects. Le duc de Chalcède sait qu’il est un
Ancien, qu’il a fréquenté les dragons et se met donc en tête
l’idée de boire son sang (« Selden poussa un gémissement de
dégoût quand la bouche du vieillard se fixa sur son poignet et se
mit à sucer son sang »).
Selden
Vestrit se fait une amie, la fille du duc (Chassim), elle aussi
captive. Quand ils voient arriver les dragons, ils savent très vite
que le château sera détruit et que de grands bouleversements vont
avoir lieu. Cela ne bouleverse pas plus que ça la jeune femme
puisqu’elle dit que « je n’ai aucune compassion pour mon
père et je ne m’offusque pas d’une mort dont il est
responsable. »
Nous
retrouvons avec plaisir le vieux dragon noir, Glasfeu. Libéré des
glaces par Devoir, il a voyagé à travers le monde et a failli
mourir empoisonné, piégé par les humains qui ont drogué du bétail
offert. Il arrive à Kelsingra, ne prête quasiment pas d’attention
aux humains et délivre son message : « je viens voir s’il
existe encore des dragons digne de ce nom prêts à me venger de ceux
qui veulent tuer ceux de notre race pour leur chair ».
Dans
leur quête de destruction, les dragons sont accompagnés par des
gardiens et Reyn (le compagnon de Malta). Lors de leur voyage vers
Chalcède, nous voyons à quel point la petite communauté des
gardiens a évolué depuis le premier tome. Eux qui étaient des
parias sans liens, choisis car rejetés, ont fini par créer des
liens de respect et d’autorité. Chacun a trouvé sa place et Reyn
(un élément extérieur ) en a bien conscience.
Quand
Reyn retrouve Selden, on voit bien à quel point les humains se sont
appropriés et partagent la vengeance des dragons (« nous
arrivons de Kelsingra, Selden, et nous venons tuer le duc de Chalcède
qui a eu l’audace de de chasser des dragons pour leur prendre leur
sang »).
Chalcède
détruite, les humains considérés comme des choses futiles… tout
est-il logé à la même enseigne par les dragons ? On savait
déjà, en lisant la Tawny Man Trilogy et les Aventuriers de la mer,
que Tintaglia avait bien peu de reconnaissance envers les humains
alors qu’ils ont protégé les serpents et sauvé Glasfeu. Pour
autant, les dragons ont des plaisirs simples (de la viande, du
sable…) et ils n’oublient pas les endroits où les trouver
(Mercor nous apprend que Tintaglia a un bon souvenir des Six-Duchés
car à « chaque fois qu’elle s’y est rendue, on lui a
offert du bétail gras et un refuge pour dormir sans crainte »).
Brashen
fait une apparition dans le roman. Le capitaine a été témoin de
nombreux événements. Il est celui qui a remis en route la vivenef
maudite, le Parangon. Il a vu les changements subis et vécus par
Terrilville. Il faut dire que ses fréquentations ont la fâcheuse
manie d’être là où les choses se font et parfois d’en être
aux origines (« on dirait que vous avec ça dans le sang, de
changer l’histoire ; d’abord Hiémain et Malta, aujourd’hui
Selden »).
Le
Puits d’Argent introduit donc pour de bon les dragons. Il ne s’agit
pas des dragons de pierre (des Six-Duchés) ou simplement de
Tintaglia et de Glasfeu mais aussi de plein d’autres. Notons au
passage qu’un grand nombre de ces personnages seront présents dans
la trilogie du Fou et de l’assassin. Ces livres offrent l’occasion
aux dragons d’assouvir une nouvelle vengeance, de retourner à
Kelsingra, de revoir les gardiens et les Anciens et, entre autres
choses, d’en apprendre plus sur la disparition des dragons.
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