Du point de vue du Fou, la relation avec Fitz a souvent offert de la douleur. Il a plusieurs fois exprimé publiquement son amour à Fitz sans rien recevoir en retour.
Pire, il y a eu des moments où Fitz a été cruel et dur envers lui ; on pense par exemple à la réaction du bâtard après avoir fait la connaissance de Jek (« Jamais je ne pourrais te désirer comme compagnon de lit. Jamais »). Fitz est vexé de savoir que le Fou a d'autres identités et qu'il est amoureux de lui. Il réduit les sentiments du Fou à une question sexuelle, d'intimité. Il le prend mal, très mal et durant un bon moment, le lien entre les deux est rompu.
Cette douleur, le Fou s'y attend. Lorsqu'il a revêtu le costume d'Ambre, il disait bien à Althéa que « pour aimer ainsi, il faut admettre que la vie de l’autre a autant d’importance que la tienne. Plus dur encore, il faut admettre que l’autre a des besoins que tu ne peux pas satisfaire et que tu as des tâches qui te retiennent loin de lui » : la référence à Fitz est claire puisque le Fou a dû vivre avec l'idée que Fitz aimait Molly.
Pour autant, Fitz n'a pas toujours eu du mal à exprimer ses sentiments. Il y a un bon nombre de moments où il a osé dire au Fou ce qu'il était pour lui, où il n'a pas eu honte de dire aux autres à quel point il comptait pour lui. Car le Fou compte pour Fitz, il occupe une place importante dans sa vie. Il faut dire que les deux ont participé ensemble à des moments éprouvants, pénibles, des moments où ils ont failli mourir. C'est par exemple le cas de la quête de Vérité où les deux amis se sont enfoncés dans les Montagnes pour retrouver le prince. Là, leur amitié a été mise à rude épreuve : l'esprit du Fou a été envahi par les artiseurs de Royal et la limite de la confiance a souvent été franchie. Dans les moments finaux de l'intrigue, Fitz et le Fou se séparent, pas parce que Fitz en veut au Fou. La séparation est un déchirement pour les deux puisque ils ont fini par comprendre qu'ils pouvaient tout se pardonner, même l'influence néfaste de Royal. Le Fou va devenir Ambre et se réfugier à Terrilville, alors que Fitz deviendra Tom Blaireau et se coupera du monde, près de Forge. Là, il ne vivra qu'avec son loup Oeil-de-Nuit et son fils adoptif Heur. Ce seront des moments de regrets ; quand il pense au Fou, ressent un vide, une douleur sourde et lente, la nostalgie d'un ami perdu : « les empreintes de doigts qu'il a laissées sur mon poignet sont désormais gris sombre. Je crois qu'il me manquera toujours. »
Des années plus tard, un Fou changé physiquement reviendra dans la vie de Fitz. Les retrouvailles sont chaleureuses et le Fou s'immerge dans la vie de Fitz sans la bouleverser. Les deux se comprennent immédiatement, partagent leurs souvenirs de leurs années d'absence. Selon Oeil-de-Nuit, à eux trois, Fitz, le Fou et le loup forment une unité. Avec le Fou, Fitz se sent particulièrement à l'aise. Quand les événements les poussent à retourner à Castelcerf, les événements poussent les deux à se déguiser pour ne pas être reconnus. Fitz se demande comment les gens de Castelcerf ne peuvent pas reconnaître le Fou tant il détonne dans le décor, tant il est atypique (« pourtant, j'ai su qui tu étais dès que je t'ai vu »). Entendre de tels mots réchauffe le cœur du Fou : Fitz voit au-delà de son apparence, leur lien est fort.
S'ils sont de retour à Castelcerf, c'est pour retrouver le prince Devoir qui a fugué. Le Fou devient Sire Doré,un noble, alors que Fitz est son serviteur, Tom Blaireau. Fitz jette un regard bien moins encourageant sur Sire Doré qui dépasse bien souvent les limites de la convenance. De son côté, le Fou est parfois choqué des actes extrêmes de Fitz pour retrouver Devoir. Leur amitié est donc mise à rude épreuve. Après avoir retrouvé Devoir, ce dernier s’étonne de savoir qui sont ces deux personnes. On pouvait attendre de Fitz un mensonge, qu'il tente de camoufler les choses ; il décide de dire la vérité : « c'est un ami, mon prince, le meilleur que j'ai jamais eu ».
Devoir est un prince, c'est surtout un adolescent à qui on demande beaucoup. Sa mère l'a éduqué dans l'idée qu'il était au service du peuple. Il doit épouser une jeune femme qu'il vient de rencontrer et qui lui lance un défi pour prouver sa valeur. Du fait de son statut de prince, il est isolé et doit faire attention à ses relations. Il n'est donc pas étonnant qu'il écoute beaucoup et attentivement les rares amis qu'il a. Civil est l'un d'entre eux ; ce dernier est un homme rancunier qui n'a pas oublié ce que Sire Doré lui a fait (il l'a embrassé). Civil met donc en garde Devoir contre Doré et ses penchants douteux. Fitz remarque le comportement de Devoir, la façon dont il s'éloigne du Fou. Il le prévient qu'il faut un choix déplorable, un choix qu'il pourrait regretter. Il parle alors du Fou de façon éloquente en disant que « j’avais remarqué votre froideur à l'égard de sire Doré, ces derniers temps. Si elle tient au motif que vous venez de m'exprimer, vous ne savez pas ce que vous perdez en ne le connaissant pas davantage. Une fois qu'il est devenu votre ami, on ne saurait en trouver de plus fidèle ». Car, si le Fou tient énormément à Fitz, il ne faut pas oublier, et Fitz le sait, que le Fou a pris soin de Kettricken quand elle a fui Castelcerf ou qu'il a pris soin de Vérité à la carrière dans les Montagnes.
La quête de Devoir mène les personnages jusqu'à Aslevjal, une forteresse des Anciens dont s'est emparée la Femme Pâle. La Femme Pâle est la grande antagoniste du Fou, celle qui cherche à contrecarrer ses plans et empêcher le retour des dragons. Elle est prête à tout pour arriver à ses fins : elle séduit Fitz, torture le Fou. Mais, les événements tournent mal pour elle ; les dragons sont de retour, ses forces sont battues. Pire, elle échappe de peu à la forgisation en y laissant les deux mains. De retour dans la forteresse, le cadavre du Fou dans ses mains, Fitz la trouve errante. La Femme Pâle est seule, privée de toutes ressources. Dans son délire, elle tente de convaincre Fitz avec de vaines promesses : elle lui promet la gloire, la renommée, un fils, tout et n’importe quoi. La réponse de Fitz est limpide : « Mon rêve je le tenais dans mes bras, et il était mort. »
Puis, il s'en va, et grâce à la magie de l'Art et un artefact des Anciens, il ramène le Fou à la vie. Le Fou plonge dans un monde inconnu lui qui avait prophétisé avec certitude sa mort à Aslevjal. Il ne sait pas où aller, quoi faire. Il a une unique certitude : il doit laisser partir Fitz, le laisser rejoindre Molly. Il décide alors de rompre le lien d'art entre les deux. En faisant cela, il espère montrer à Fitz sa conviction. La réaction de Fitz l'étonne (« Et si je te suivais ? Si je renonçais à mon autre vie pour partir avec toi ? »). Il est presque sans voix quand son meilleur ami lui dit qu'il est prêt à tout sacrifier pour lui. Il comprend la mesure du sacrifice de Fitz, le fait que Fitz est prêt à ne pas rejoindre celle qu'il a toujours aimé pour lui.
Le Fou part donc. Prilkop et lui effectuent un bien mauvais choix en retournant à Clerres. Fitz, lui, continue sa vie avec Molly. Les deux vivent une vie de noble. C'est une vie avec ses soucis inhérents, mais bien plus calme et paisible que Fitz a connue par le passé. Fitz est heureux avec Molly, il vit enfin avec la femme qu'il aime. Il est loin des intrigues de Castelcerf, sa vie n'est pas menacée, il ne doit pas mener de missions secrètes. On pourrait croire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes sauf que quelque chose perturbe toujours Fitz : l'absence du Fou. On lit que ça fait plus de « dix ans que je n'ai pas vu le Fou. Je sentis mon cœur tomber comme une pierre au fond d'un puits ». Fitz a donc besoin de son vieil ami dans sa vie, il est en attente de nouvelles.
Fitz et le Fou finissent par se retrouver alors que la fille de Fitz (Abeille) est enlevée. Pour la retrouver, ils naviguent jusqu'au bout du monde (Clerres) et assistent à la destruction de la ville par les dragons. Mais, ils sont séparés et, tandis que le Fou et les autres rentrent à Castelcerf, Fitz s'en va vers la carrière pour sculpter son loup de pierre. C'est Abeille qui préviendra les autres où est Fitz et leur permettra de les rejoindre. Ils ont devant les yeux un spectacle pathétique : Fitz est rongé par les vies, obnubilé comme Vérité par la réalisation de sa dernière œuvre, sans émotions. C'est un être froid que retrouvent ses amis. Son loup de pierre et d'Art l'épuise, lui prend tout ce qu'il a. Malheureusement, Fitz n'a pas assez en lui et il demande une dernière aide. Cela ne peut être que le Fou : « et mon père leva la main (…) sa main humaine monta, puis il la retourna pour montrer sa paume ensanglantée, et ses lèvres craquelées bougèrent. Bien-Aimé ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire