Oeil-de-Nuit est le réel Roi. Le Fou versus la Femme Pâle : le combat du siècle. Oh Malta, Malta, Malta. Gloire au dragon fou Glasfeu. Les Anciens ne sont que des gosses. Keffria, tu remontes dans notre estime. Il était une fois Clerres.

Article épinglé

Petit-Furet dans la légende

Il existe des personnages qui paraissent anodins et qui ont un grand impact sur l’histoire. Il existe des personnages qui accomplissent des ...

mercredi 22 janvier 2020

La transformation de Devoir

A la fin de la Reine Solitaire, nous apprenons que Kettricken a eu un fils : Devoir. Si il a été engendré avec le corps de Fitz, c'est Vérité qui en est le père : les deux hommes se sont servis de l'Art pour y arriver.

Fitz s'est coupé du monde et nous avons très peu de nouvelles de la famille et des activités royales. Lorsque Umbre fait à nouveau irruption dans la vie du reclus, nous apprenons que Devoir a disparu. Le vieil assassin demande donc à Fitz (ou Tom Blaireau) de le retrouver il est accompagné de Laurier et du Fou. Ils finissent par lui remettre la main dessus et c'est un adolescent trahi et bougon que nous découvrons. Il a,semble-t-il, une tendance à s'apitoyer sur son propre sort et il n'est pas exagéré de dire que le poids de son statut lui pèse sur les épaules. Nous en avons un exemple, dans la Secte maudite, lorsqu'à la suite du conversation guindée et formelle avec Laurier, il affirme à Fitz que « je n'ai pas un seul véritable ami dans les Six-Duchés (…) Non, je suis seul, Tom Blaireau. Pour toujours ».

Sa relation avec Fitz est très intéressante car il ne connaît pas son identité et encore moins son réel rôle dans sa conception. Pourtant, il prend très vite Fitz en estime et ce dernier comble un vide dans la vie du jeune prince. Il lui parle franchement, sans retenue et se moque de heurter sa sensibilité (« mais d'où sortez-vous donc ? Personne d'autre que vous n'ose me parler ainsi dans ce château ? »). Toutefois, si Devoir est ravi que quelqu'un s'adresse à lui de cette façon, il a vite tendance à redevenir un gamin jaloux. Sa réaction est très marquée lorsqu'il apprend que Tom Blaireau a un fils adoptif ; aussitôt il s'enferme dans une bulle, coupe les liens : « Alors quel besoin avez-vous de moi, si vous avez déjà un fils ? »

Dans Serments et deuils vient l'heure du règlement de comptes. Il faut préciser qu'à la fin du tome précédent (Les secrets de Castelcerf), Devoir et Elliania (sa prétendante) se sont mis d'accord pour effectuer une quête visant à ramener une tête d'un dragon. Et, pour accepter ce défi, le prince des Six-Duchés a dû passer un ordre d'Art imposé par Fitz lorsqu'il l'a sauvé des griffes des Pie au moment de sa disparition. Devoir se sent alors souillé et sali par cet acte : il pense qu'il a été trahi et même manipulé et en vient à douter de ce que Fitz éprouve à son égard. Vexé, il lui dit que « vous m'avez ligoté, vous m'avez obligé à me plier à votre volonté depuis le premier jour. Vous m'avez sans doute forcé à éprouver de l'affection pour vous ». Ils finiront par se réconcilier et dépasser cette divergence.

Mais, ne dressons pas un portrait sombre du prince Devoir. Il sait faire preuve de finesse dans l'analyse des faits et dans son raisonnement. Il pousse même parfois sa capacité à cerner les choses plus loin que l'expérimenté Fitz (il sait que c'est son oncle désormais). Ainsi, quand Fitz sauve la vie de Civil (un ami de Devoir) des mains haineuses et puissantes du clan des Pies, il montre à Fitz qu'il a plus que réfléchi à la question ou cerné les enjeux en cours. Car le bâtard royal fait preuve de suspicion et se méfie énormément de Civil qu'il considère comme un élément dangereux pour Devoir. Devoir use d'un argument qui fait mouche auprès de toute personne détentrice du Vif : « FitzChevalerie Loinvoyant, il m'a remis son marguet. Si vous aviez su que vous alliez au-devant d'une mort certaine, et que vous ayez voulu empêcher Oeil-de-Nuit de périr avec vous, où l'auriez-vous laissé ? »

Le fils de Vérité a toujours voulu en savoir plus sur ses origines. Il a lu les archives royales, demandé à sa mère (Kettricken ) de raconter ses souvenirs et Fitz des anecdotes. Dès qu'il rencontre un homme ou une femme qui a connu son père, il lui demande d'en parler. C'est le cas avec le Fou (« En mer (…) j'aimerais que vous me parliez de mon père à l'époque où vous l'avez connu (…) Je sais que vous vous êtes occupé de lui lorsqu'il… à la fin de sa vie. »)
Il montre encore une fois qu'il a grandi et gagné en sagesse lors du voyage en bateau vers les Îles et de Aslevjal. Umbre, Fitz et Devoir débattent du cas Trame qui a percé à jour l'identité de Fitz ; ils se demandent ce qu'ils doivent faire et les deux premiers voient cela à travers les yeux d'assassin : il est une menace. Devoir, lui, est plus mesuré et leur rappelle que Trame s'est dévoilé à leurs yeux et a également mis son existence en jeu en le faisant (« N'oubliez pas qu'en révélant à Fitz qu'il connaissait son identité, Trame s'est mis lui-même en péril : certains seraient prêts à tuer pour maintenir enfoui ce secret »).

Il est toujours aussi à l'aise dans son costume royal par la suite même s'il doit faire face à de fortes tentations, des tentations encore plus fortes s'il s'agit de sa future femme qui s'offre à lui. Il calme ses ardeurs, ses propres envies quand il refuse d'aller plus loin qu'un simple baiser avec Elliania (qui était pourtant prête à aller plus loin) : « mon corps et ma semence appartiennent aux Six-Duchés et je n'ai pas le droit de les partager avec qui bon me semble (…) je voudrais lui demander de plus me soumettre à la tentation ». Contrairement à d'autres avant lui (Chevalerie), il a conscience de ses obligations et que concevoir un enfant hors mariage n'est pas nécessairement une bonne chose pour la famille Loinvoyant.
Il ose enfin se dresser contre les petites manies de Fitz et Umbre. Il leur rappelle que ce sont eux les subordonnés et non l'inverse. Il a bien conscience des manigances des deux hommes, des habitudes qu'ils ont prises au fil des années et de leur amour pour les missions secrètes : « vous faites les choix qui, selon vous, présentent le moins de risque, puis vous vous fondez dans le paysage en espérant que personne ne s'apercevra de rien et qu'on ne vous fera pas porter le chapeau si les choses tournent mal ». Un peu plus tard, il ajoute une couche à ses propos, il leur donne même une autre dimension en ajoutant ses craintes quant à son futur règne et au véritable pouvoir qu'il aura (« on dirait deux marionnettistes qui observent de loin la vie des gens et discutent de la manière dont ils vont les manipuler »).

Devoir a également un regard critique sur sa propre famille. Il sait que les pratiques des Loinvoyant n'ont pas toujours été bonnes ou justifiées et que le mensonge est répandu. Il en fait la remarque, ironiquement, à Fitz : « la vérité. C'est une nouveauté, je sais, mais il ne me semble pas inutile qu'un Loinvoyant s'y essaye un jour ». Difficile de lui reprocher ces paroles-là quand on sait que les deux seuls Loinvoyant qu'il a vus de son vivant sont Umbre et Fitz.
Quand Fitz est tiraillé entre sa loyauté envers Umbre et son amitié pour le Fou, c'est Devoir qui règle le dilemme en prononçant des paroles inédites, presque historiques et en tout cas nouvelles pour les oreilles de Fitz. Il lui permet enfin de décider par lui-même alors que Vérité avait, par exemple, gravé en lui un ordre d'Art afin qu'il le trouve. Il lui dit qu' « aujourd'hui, en tant que votre prince, voici ce que j'ordonne, FitzChevalerie Loinvoyant : tenez votre parole envers vous -même. Montrez-vous aussi fidèle à votre cœur que vous l'avez été à Vérité et à Subtil. C'est votre roi qui vous le commande ».

Enfin, il est intéressant de se pencher sur la relation entre Devoir et Ortie (la fille cachée de Fitz). Les deux ne se connaissent pas du tout puisque Fitz a fait tout son possible pour éloigner Ortie de Castelcerf. Leur première rencontre se fait par l'intermédiaire de l'Art et Ortie se joue de Devoir qui en est outré (« Qui je suis ? Le prince des Six-Duchés, et je vais où bon me semble »). Le fils de Kettricken est choqué le moment où il apprend quel est le lien qui l'unit à cette fille, mais il l'est encore plus par tout ce qu'on a omis de lui dire.
Une fois leur quête achevée, ils se retrouvent dans la tour de Vérité au moment des leçons d'Art. La tension est forte entre Ortie et son père et on retrouve le côté moqueur de Devoir : « on peut dire que votre mère a choisi pour vous le prénom qui convenait ». Mais, en fin de compte, Devoir est plus que content de l'existence d'Ortie, pas seulement parce qu'elle offre des possibilités d'arrangements et de négociations à la famille Loinvoyant, mais surtout pour ce qu'elle est : sa cousine ; (« je ne saurais exprimer l'importance qu'a pour moi sa présence à la cour ; j'aime sa brutale franchise. Je n'ai jamais eu d'amie comme elle »). Adieu le jeune adolescent qui se sentait incompris !


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire