Quand on pense au Nord, on pense à des hommes comme Logen ou Dow, des hommes qui ont répandu le sang, des hommes prêts à faire couler le sang pour des raisons bien futiles. Ce sont des hommes forts, puissants, craints. Une autre catégorie existe ; elle est symbolisée par Renifleur. On y trouve des gens qui sont également de formidables combattants mais qui sont plus réfléchis et plus sages ; Rudd Séquoia fait partie de cette catégorie. Les deux ont d'ailleurs servi sous Logen, tué sous ses ordres. Mais, ils n'ont pas l'aura de bête cruelle de Logen.
Rudd Séquoia mort, il entre un peu plus dans la légende. Sinistre, un de ses hommes, lui rend hommage. C'est un témoignage important car l'homme parle bien peu et est avare de mots. Il est le seul à pouvoir s'exprimer alors que l'émotion prend le groupe à la gorge. Il affirme qu' « il n'y avait pas nom plus respecté dans tout le Nord. C'était un grand guerrier. Un grand chef. Un ami formidable. Il a passe sa vie à se battre ». Ces quelques phrases résument parfaitement ce qu'il a été : une personne encline à donner des conseils mais qui savait aussi se battre. Il le fallait de toute façon pour gagner en estime dans le Nord.
Quand il retrouve les Nordistes en pleine Union, après sa longue mission avec Bayaz, Logen apprend ce qu'il est arrivé à Rudd Séquoia. Lui aussi est touché. Sa réaction montre à quel point Séquoia va lui manquer (« Forley mort, Séquoia mort. C'était une véritable honte »).
Plus tard, dans le roman Les Héros, Dow le Sombre est devenu le roi du Nord. Il se rend compte que si le poste est glorieux, il va avec son lot de complications et d'ennuis. Il se remémore une parole de Séquoia (« Séquoia m'avait prévenu mais je n'ai pas écouté. Il n'y a pas pire malédiction que celle d'obtenir ce qu'on veut »). Grâce à ça, Dow comprend que ce n'est que le début et que pour asseoir son autorité, il doit la démontrer jour après jour. C'est d'autant plus pertinent que les combattants du Nord, dans leur immense majorité, ne reconnaissent que la force. Le roi du Nord doit prendre en compte toutes les spécificités, tous les avis parfois divergents des chefs de clans. Il doit faire avec des hommes et des femmes qui n'ont pas toujours envie de suivre le plan établi. Le pouvoir éloigne et Dow s'en rend compte. Là encore, Séquoia l'avait prévenu que ce n'était pas si beau que ça (« On pourrait croire que c'est simple d'être chef. Mais c'est comme de tirer une putain de montagne à travers un champ de boue. Séquoia m'avait prévenu. Les chefs sont toujours seuls »).
Dow fanfaronne. Il est un leader qui aime montrer sa force, qui est presque aveuglé par sa certitude d'être le plus fort. Ses paroles sont parfois humiliantes (il le paiera d'ailleurs avec Caul Shivers qui le tuera alors que Dow ne cessait de le traiter de chien). Pour Craw (son second), c'est un manque de discernement flagrant, une arrogance mal placée : « Craw garda le silence. « Savoure ta victoire dans le silence », disait Rudd Séquoia, « tu pourrais être appelée à vivre une défaite assortie ». Visiblement, Dow n'a pas bénéficié de ce conseil.
Mais, Dow sait flatter Craw et s’attacher ses services. En le comparant à Rudd Séquoia, il lui fait un immense honneur (« Craw cligna des yeux. Ce devait être l'un des plus beaux compliments qu'on lui ait jamais faits »).
Des années plus tard, le souvenir de Rudd Séquoia est toujours vivace. Les grands noms du Nord ont disparu mais ils ont transmis à la nouvelle génération les histoires, les mythes. Rikke se rappelle l'attitude son père (Renifleur) lorsqu'il pensait à ses vieux amis (« les yeux humides de son père lorsqu'il entendait les noms de Rudd Séquoia, de Tul Duru ou même de Dow le Sombre »). Le nom de Séquoia est systématiquement associé aux grands noms. Stour Ténèbres, un guerrier particulièrement frimeur, remarque que « le Neuf-Sanglant a eu des adversaires comme Rudd Séquoia, Dow le Sombre et Harding Grim ».
Mais, les hommages, aussi poignants soient-ils, n'effacent pas la réalité. Séquoia a été tué dans une guerre qui ne le concernait pas, bien loin du Nord. Pire, il n'est pas mort dans un combat glorieux, il n'a pas eu la fin qu'il méritait. Dans Servir froid, Caul Shivers pense à la destinée de Rudd Séquoia. Il « avait été un homme bon, le meilleur. Il avait respecté la tradition toute sa vie, et n'avait jamais choisi la voie facile s'il la jugeait mauvaise. Shivers était fier d'avoir combattu à ses côtés (…) et en fin de compte, que lui avait apporté son honneur ? Quelques histoires larmoyantes au coin du feu. Ça, et une vie difficile, une place dans la boue ». C'est un moment important dans la vie de Shivers qui tente désespérément de donner un autre sens à sa vie. Il est en partie inspiré par Séquoia. Mais, contrairement à lui, il sombrera et replongera dans la folie meurtrière.
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