Oeil-de-Nuit est le réel Roi. Le Fou versus la Femme Pâle : le combat du siècle. Oh Malta, Malta, Malta. Gloire au dragon fou Glasfeu. Les Anciens ne sont que des gosses. Keffria, tu remontes dans notre estime. Il était une fois Clerres.

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dimanche 30 juin 2024

Mercor, la fureur de vivre

Les dragons sont de retour. Ceux qui sont destinés à dominer les autres créatures animales, humains compris, sont de retour. En tout cas, ils semblent l’être puisque, dans les Cités des Anciens, les dragons ne sont que des animaux faibles et dépendants. Ils ne volent pas, ils ne chassent pas, ils sont juste là à attendre qu’on leur apporte de quoi se nourrir. Ils sont un coût, un fardeau pour la communauté dont les Marchants veulent se débarrasser. Certains des dragons ne se rebellent pas contre leur triste sort et l’acceptent ; d’autres rêvent d’autre chose, c’est le cas de Mercor. Il rêve de Kelsingra, la cité mythique des Anciens.


Mercor détonne parmi les dragons présents au début des Cités des Anciens. Il semble prendre le temps d’observer le monde qui l’entoure, d’analyser la situation des dragons et les motivations des humains. Dans la petite communauté des dragons, il n’est pas en apparence un leader ou un dragon cherchant à dicter ses volontés. Au contraire, Mercor « parlait rarement et ne s’imposait jamais ; une terrible tristesse paraissait lui ôter tout courage et toute ambition. Quand il prenait la parole, les autres s’interrompaient dans leurs activités pour l’écouter malgré eux ». On pourrait presque croire que Mercor a honte de ce qu’il est : si il est triste, c’est parce qu’il sent au fond de lui qu’il n’est pas un véritable dragon.

Avec le temps, Mercor s’affirme. Il prend de plus en plus souvent la parole et se moque de ses compagnons qui se vantent d’être des chasseurs, des créatures féroces. Or, aucun d’entre eux n’est Tintaglia. Ils ne sont que des animaux faibles soumis au bon vouloir des hommes. C’est ce qu’il rappelle à Kalo : « tu ne manges donc pas ce qu’ils te donnent ? Tu ne restes donc pas là où ils nous ont cloitrés ? ». Mercor est réaliste : il sait que lui et les autres n’ont pas encore recouvré leur destinée de dragon et qu’ils ont besoin des hommes, que ce soit pour survivre ou partir ailleurs. Il le dit clairement  : « nous sommes des dragons, faits pour sillonner librement la terre et le ciel ; sans un corps en bonne santé et des ailes utilisables, nous ne pouvons pas chasser (…) il faut que les humains chassent pour nous et aident ceux d’entre nous qui sont affaiblis physiquement ou mentalement ».

Mercor n’est pas seulement déterminé. Partir, quitter cette terre où il est condamné à être une larve est une nécessité. Il veut au moins tenter sa chance, ne dépendre de personne. Il est prêt à tout risquer, même sa vie (« j’aimerais mieux mourir libre que comme un boeuf à l’abattoir (…) si je dois mourir, que ce soit en dragon et non en ces créatures lamentables que nous sommes aujourd’hui »).


Dès lors, il n’y a pour lui qu’une possibilité. Il le hurle d’ailleurs : « Kelsingra, je ne t’oublie pas ! Aucun de nous ne t’oublie, pas même ceux qui ne veulent pas se souvenir ! ». Il faut préciser que les dragons ont des souvenirs qui dépassent normalement leur propre personne mais qui concernent toutes leurs espèces. Or ces dragons-là ont émergé faibles et privés d’une bonne partie de leurs souvenirs. Pour beaucoup d’entre eux, Kelsingra n’évoque rien.

Pour autant, Mercor a bien conscience que les dragons ne pourront pas atteindre Kelsingra seuls. Ils ont besoin d’aide. Il parie alors sur l’avidité des humains en leur faisant miroiter des richesses. Il fait clairement preuve de malice quand on lit que « il n’avait jamais rien affirmé devant un humain, mais s’arrangeait pour que les dragons évoquassent les merveilles de Kelsingra quand les hommes se trouvaient près d’eux ». Cela fonctionne puisque des adolescents, des rebuts leur sont attribués comme gardiens. Ils devront prendre soin des dragons le temps du périple. Une vivenef et un équipage les accompagnent également.


La transformation de Mercor devient alors complète. Du dragon qui ne faisait pas de vagues, il est devenu celui qui mène les autres vers leurs réels identités et statuts. Il est celui qui les guide, pas uniquement de façon métaphorique, mais aussi concrètement : « il se tourna et se dirigea vers les hauts-fonds du fleuve. Pendant un moment, les autres le regardèrent sans réagir, puis, brusquement certains lui emboitèrent le pas » et « nous devons remonter le fleuve ensemble pour retrouver Kelsingra : pour devenir des dragons chemin faisant ».


Et sa stratégie fonctionne. Livrés presque à eux-mêmes, accompagnés par des gardiens qui doivent eux aussi se forger une identité, les dragons trouvent en eux des ressources et des attitudes insoupçonnées. Sintara tue sa première bête : « ce n’était pas la viande, excellente au demeurant, qui avait éveillé cette envie chez elle, mais la lutte avec sa proie et surtout le triomphe d’avoir porté le coup de grâce (…) Elle voulait recommencer tout de suite ». Grâce à Mercor, Sintara ressent enfin un peu de ce qui fait d’un dragon un dragon.

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