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Petit-Furet dans la légende

Il existe des personnages qui paraissent anodins et qui ont un grand impact sur l’histoire. Il existe des personnages qui accomplissent des ...

mardi 8 août 2023

L'histoire de Brodette

Pendant que certains écrivent la grande histoire, sont impliqués dans des machinations politiques ou tentent de façonner le monde, d’autres se contentent de servir. Ils le font parce que c’est leur métier, ou par amitié. Brodette est un bon exemple, un personnage de l’ombre à l’apparence anodine mais qui permet à d’autres de briller. Brodette n’a pas uniquement servi Patience, elle a contribué à l’éducation de Fitz et elle fait partie de celles qui ont soutenu Kettricken ou Molly.


L’image qu’on a de Brodette nous vient de Fitz et des personnes que le jeune bâtard qu’elle fréquente. Puisque Fitz est le narrateur du récit, c’est grâce à ses allées et venues dans le château qu’on peut dresser un portrait de Brodette. Il apparait que Brodette est tout sauf une simple servante. La docilité ne semble pas être son point fort comme le remarque Mijote, la cuisinière : « Brodette, par contre, en voilà une qui a la tête sur les épaules ; mais elle n’est pas causante et elle n’écoute pas volontiers ce que les autres ont à dire ». Brodette semble donc avoir du caractère. C’est un trait important quand on passe du temps avec Patience qui est une femme qui a besoin de cadre pour organiser ses idées et ses actions. On en a un exemple avec Fitz : Patience décide de l’éduquer comme si c’était son fils et les activités partent dans différentes directions, sans fil conducteur. C’est Brodette qui mettra de l’ordre en se basant sur sa propre histoire (« j’ai eu des fils et je sais que les adolescents (…) on dirait qu’ils n’apprennent rien, qu’ils ne mûrissent pas, qu’ils n’ont pas de manière, mais il suffit de tourner le dos et les voilà qui grandissent »).

Il est clair que Fitz respecte Brodette. Il ne la respecte pas parce qu’il le doit mais pour ce qu’elle est. Brodette ne se contente pas de servir Patience, elle partage avec elle un bon nombre de passions et elle est aussi une femme capable. Quand Molly lui demande ce qui fait d’une femme une bonne épouse selon lui, il utilise Brodette comme référence : « regarde dame Patience et sa servante Brodette : elles sont constamment en train de bricoler à droite et à gauche (…) elle a les doigts aussi agiles que n’importe quelle fabricante de filets des quais ».


Servante, Brodette est invisible pour beaucoup de nobles. Ils ne lui accordent aucun crédit, elle ne compte pas. Brodette ne s’en offusque pas plus que ça car ça lui permet d’observer les gens et ce qui se passe. Fitz s’en rend compte quand elle lui dit que « dame Patience s’est prise d’une grande affection pour vous ». Jusque là, il était convaincu que Patience s’occupait de lui uniquement parce qu’il était le fils de Chevalerie et non par affection.

Quand les choses gâtent et que Royal resserre son emprise sur le château, Fitz, Burrich et les autres tentent de mettre à l’abri Kettricken en organisant une fausse évasion. Alors qu’ils viennent de lui faire simuler une fausse couche pour protéger l’enfant à naître, ils se réunissent et commencent à boire. Pour eux, c’est un simple réconfortant ; pour Brodette, c’est une faiblesse, un manquement : « nous jouons notre vie et notre réputation, et vous ne trouvez rien de mieux à faire que de vous soûler ! (…) Au bout de vingt ans, vous n’avez toujours pas appris que ça ne résolvait rien ? » Les mots sont durs mais justes tant la situation est précaire. Elle est celle qui les ramène à la réalité.


Brodette n’est donc pas une servante comme les autres. On apprend qu’elle est aussi la garde du corps de Patience. Là encore, elle profite du fait qu’on ne la considère pas. Les gens qui voudraient du mal à Patience ne verraient pas en elle un obstacle. Pourtant, Patience doit forcément avoir quelqu’un qui la protège puisque, si les choses avaient tourné différemment, elle aurait été la femme du roi. Même Fitz ne saisit pas entièrement qui est Brodette. C’est Patience qui lui dit que Brodette est « l’élève la plus douée qu’Hod ait jamais eue, bien qu’elle fût déjà adulte quand elle a commencé son apprentissage ». Fitz avait été averti d’avoir un autre regard sur Brodette. Umbre sait forcément qui est Brodette et quel est son rôle auprès de Patience. Fidèle à sa façon d’enseigner, il ne dit pas clairement à Fitz mais ce qu’il dit est suffisamment clair pour alerter Fitz (« dans le couloir, il me revint une réflexion d’Umbre : il m’avait dit que je sous-estimais Brodette »).

Ce côté protecteur est conservé toute sa vie par Brodette. Mêmes des décennies plus tard, alors qu’elle a pris de l’âge et que la fatigue la gagne, elle n’oublie pas son devoir envers Patience. Lorsque Fitz apprend aux deux femmes qu’il est bel et bien vivant, il prend un après-midi pour raconter son histoire. Les deux femmes finissent par s’assoupir, Fitz s’en va discrètement mais Brodette réagit (« comme je soulevais le loquet,  Brodette se dressa sur un coude ; elle entendait parfaitement, et sans doute, malgré ses doigts déformés, trouvait-on encore un poignard dissimulé dans sa manche »). Pour synthétiser, « Patience avait toujours Brodette à ses côtés, et nul ne s’étonnait que l’épouse du prince Chevalerie se déplaçât toujours avec sa servante ». Il est difficile de savoir si leur relation a démarré avec la nécessité de protéger Patience mais elles ont créé un lien fort.

Brodette est aussi la confidente de Patience. Cette dernière se repose beaucoup sur elle afin de faire des choix. Alors qu’elle est un peu dans une impasse dans l’éducation de Fitz, elle parle de la situation avec Brodette qui lui offre visiblement des conseils utiles (« en parlant avec Brodette, je me suis rendu compte que je t’avais déjà pardonné »). En réalité, les deux sont devenues des amies et on n’est plus dans une relation maîtresse / servante. D’ailleurs, en prenant de l’âge, Brodette perd en vitalité. Beaucoup de dame se seraient détournés de leur servante, ce n’est pas le cas de Patience (« l’âge venant, les rôles s‘étaient inversés, et Patience s’était occupée avec dévouement de sa domestique malade jusqu’à la fin »).


D’autres que Fitz ou Patience ont pu connaître Brodette. C’est le cas de Molly qui a trouvé en elle une réelle aide en arrivant au château (« dame Patience est gentille et Brodette est devenue une véritable amie »). Umbre, lui, garde un oeil professionnel : il perçoit Brodette comme un atout. Il l’observe et c’est un compliment de sa part. C’est lui qui a donc averti Fitz de voir en Brodette plus qu’une simple servante (« c’est quelqu’un de plus profond que tu ne l’imagines (…) je crois qu’en secret elle te considère comme une tête de linotte »).


Patience et Brodette ont donc participé à l’éducation de Fitz. Patience se voyait clairement comme la réelle mère du bâtard. Est-ce le cas de Brodette ? Devoir nous fournit une réponse après que Fitz ait frôlé la mort après l’affrontement contre Laudevin. Le jeune prince raconte ses souvenirs d’enfance à son cousin. Il lui apprend que les deux femmes tenaient énormément à Fitz et qu’elles n’ont jamais pu digérer sa mort (« on aurait cru qu’elles ne pouvaient s’empêcher de m’entretenir de vous, même si Patience finissait souvent en larmes »). En effet, pour Brodette, Fitz est mort dans les cellules de Castelcerf. Il a été battu, torturé à mort. Elle a vu son corps : « nul souffle de ses poumons n’embuait le miroir, nul battement n’agitait son coeur. Il était mort ». Les deux ont pris soin de son corps, ont soigné ses blessures alors que Fitz n’était qu’un cadavre. Elles lui ont rendu un dernier hommage et elles lui ont ainsi permis de pouvoir revenir à la vie. 


Fitz étant Fitz, il ne les a pas averties qu’il était bel et bien vivant. Le choc a donc été total quand elles sont tombées, par hasard, sur lui. Brodette a été saisie, choquée. Elle murmure à Patience que « c’est lui ou son fantôme. Il ressemble trait pour trait à son père au même âge ». Brodette avait entendu des rumeurs, elle n’osait pas y croire (« rappelez-vous ce ménestrel vifier qui nous a chanté cette ballade sur les dragons et le Bâtard au Vif qui avait ressuscité pour servir son roi »). Dès lors, comme à son habitude, Brodette est directe avec Fitz. Elle lui parle franchement et lui reproche, à juste titre, son silence. Elle le met au pied du mur en le pressant : « et voici que nous te retrouvons vivant ; mieux vaudrait que tu aies une explication convaincante à nous fournir, mon petit ».


Les années passant, Brodette vieillit. Brodette perd en vitalité et devient malade. Patience prend alors une décision forte qui montre toute l’estime qu’elle a ; elle « avait embauché deux femmes pour l’aider à s’occuper de sa vieille servante ». Malheureusement, Brodette meurt : « nous allâmes rendre visite à Patience (…) et disposer une fleur sur la tombe de Brodette ». 

Brodette a donc disparu et son souvenir perdure. C’est la preuve qu’elle a marqué des gens quand on lit Braise dire que « j’ai entendu parler de Brodette ». Or, Braise n’a jamais fréquenté Brodette, c’est donc qu’on lui a raconté de bonnes choses. Patience, elle, n’a pas oublié sa vieille amie. Dans le Fou et l’assassin, quand il faut chercher un nom au bébé de Molly et Fitz, elle propose Brodette (« cherchons un nom solide mais jolie. Brodette ? Ça te plait ? Brodette »). Encore une preuve que Patience a énormément compté sur Brodette, qu’elle l’a beaucoup appréciée.

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