Subtil à Royal : « Ou bien comptes-tu t’en désintéresser et le laisser traîner, au risque que quelqu’un s’en empare et s’en serve contre toi ? »
Subtil donne ici une réelle leçon à son plus jeune fils, Royal. Fitz vient d’arriver à la capitale, au château de Castelcerf. Sa naissance puis sa reconnaissance ont rebattu toutes les cartes : Chevalerie, son père, a abdiqué et Vérité est devenu Roi-Servant. Fitz n’est pas un enfant légitime, il est un bâtard, il est entre deux mondes. Subtil a bien conscience qu’il ne peut pas laisser un rejeton royal vagabonder comme ça. Ce serait ouvrir des appétits inutilement dangereux pour la stabilité du Royaume. Il décide donc de prendre les choses en main et de faire de Fitz son outil, et d’anticiper d’éventuels futurs appétits.
Bien que bâtard, Fitz est quand même de sang royal et donc un invité de marque à traiter avec considération. Pour le moment, il est loin de tout ça : il lui faut acquérir les bases de la bonne attitude en société. Et, Subtil étant un Roi prévoyant, il décide de former Fitz à l’assassinat, à l’espionnage et autres joyeusetés. Il le confie donc à Umbre, frère bâtard de Subtil. Umbre va alors dans les années à venir s’employer à assurer la fidélité de Fitz aux Loinvoyant.
Royal, lui, tout au long des romans va traiter Fitz, avec mépris, dédain et violence. Il va tout faire pour ruiner son existence. Il sabotera son apprentissage de l’Art, il colportera des rumeurs sur la relation entre Fitz et Molly. Tout cela contribuera à créer une inimitié entre les deux, et à cimenter le lien entre Fitz et Vérité (Vérité et Royal ne s’entendent pas du tout). Royal a donc créé son propre ennemi tout seul.
Enfin, Fitz est un bâtard royal et il pourrait être susceptible d’être tenté ou prix dans une folle aventure qui mènerait à la scission du Royaume. Tout cela serait aller contre la volonté des Loinvoyant et tout ce qu’ils ont accompli.
Le Duc de Béarns : « Si vous jugez opportun de vous opposer à Royal, de vous déclarer roi-servant à sa place, Béarns, Rippon et Haurfond seraient prêts à vous soutenir ; la reine Kettricken en ferait autant, j’en suis convaincu, et tout Castelcerf aussi »
Les Six-Duchés sont au bord de l’implosion. Les Pirates Rouges ne cessent d’attaquer et le roi Subtil décline. Sa santé vacille, il n’est plus qu’une ombre sur le trône. Vérité est déclaré mort alors qu’il est en quête des Anciens, et l’appétit de Royal est démesuré. La nature de Royal le pousse à chercher la confrontation et à se créer des ennemis. Il est convaincu qu’un complot est ourdi pour le tuer, il est convaincu qu’on veut prendre sa place dans la succession. Son penchant pour la boisson et la Fumée contribue à créer une situation explosive. Rancunier, il refuse d’allouer plus de fonds aux duchés côtiers. Ces derniers sont donc désemparés et se tournent vers d’autres soutiens. Ils abordent Kettricken qui fait ce qu’elle peut, mais elle reste une étrangère à leurs yeux. Ils décident donc de se tourner vers Fitz et lui proposent littéralement une grande partie du Royaume. On en arrive donc à la situation que Subtil avait pronostiqué des années auparavant.
Ce qui est intéressant de noter est qu’à ce stade du récit Fitz a pleinement conscience des appétits de Royal, au contraire de Subtil et Umbre. Subtil est aveuglé par son amour pour son fils et Umbre refuse de croire que Royal ira jusqu’au bout de sa folle aventure et qu’il retrouvera la raison. Il ne comprend pas quelles pourraient être les motivations de Royal à gouverner un Royaume déchiré, il refuse de voir que Royal est prêt à tout pour se venger de ses ennemis.
Fitz est bon symbole de ralliement. Il est de sang Loinvoyant, il a vaillamment défendu le Royaume (l’île de l’Andouiller, Finebaie). Surtout, en ce qui concerne les intérêts personnels de Béarns, il est promis à sa fille Célérité.
Par la suite, Fitz ira voir Umbre pour lui expliquer la situation. Le vieil assassin criera donc à la trahison, une réaction logique. Il ne veut pas voir que Subtil n’est roi que par le nom et qu’en réalité c’est Royal qui gouverne. Il est toujours convaincu que Royal peut faire du bien. Et cela même si ce dernier a tenté de l’empoisonner quelques temps auparavant (Rôdeur, sa belette, en fera les frais).
Devoir à Fitz : « Si elle vous baptise oblat, c’est qu’elle vous regarde comme le roi légitime des Six-Duchés, et cela sans doute depuis que mon père est mort »
Le premier cycle de l’assassin royal se termine sur un Fitz coupé du monde. Il s’en va vivre dans une maison près de Forge, loin du trône qu’il vient de sauver et sans que la population ne sache tout ce qu’il a fait pour elle. Rares sont ceux qui savant ce qu’il a fait : Astérie, Umbre, Kettricken. Les autres ont disparu (Caudron et Vérité).
Quand s’ouvre le second cycle, Subtil, Royal et Vérité sont morts. Kettricken est la Reine. On ne sait pas trop ce qu’il est advenu d’auguste, sauf qu’il a perdu une grande partie de ses capacités physiques et intellectuelles après une intense expérience d’Art. Il ne reste donc que Fitz et aux yeux de Kettricken il mérite non seulement le trône, et à défaut une reconnaissance publique. Fitz refuse.
Il est pourtant ce qui se rapproche le plus de la définition d’oblat, le terme que les gens des Montagnes utilisent pour parler du roi, c’est-à-dire un homme qui sert son peuple sans rien attendre en retour.
Devoir, le fils de Kettricken et de Vérité (et un peu de Fitz), ne découvrira la vérité que bien plus tard. Il faudra que Fitz soit à l’article de la mort pour que Kettricken décide de lever le secret. Elle l’aurait fait bien avant mais Umbre et Fitz ont tout fait pour la stopper.
Kettricken écoute, depuis son mariage, Fitz avec grande attention. Il peut même être considéré comme un conseiller. Certes, dans le second cycle, il est déguisé en serviteur mais à chacune de leurs rencontres Kettricken prend bien soin de lui demander son avis.
La Femme Pâle : « Rase-le, Henja ; je désire contempler le visage nu de celui qui a failli être roi »
Il faudra attendre les deuxième et troisième trilogies pour comprendre pourquoi les Pirates Rouges se sont tant déchaînés. Il ne s’agit pas d’une guerre classique de conquête, de différends entre pays voisins. Les Pirates Rouges ont été manipulés, pris dans un affrontement plus vaste entre d’un côté, les Serviteurs et les Blancs, et de l’autre les Dragons et les Anciens. Il fallait tout faire pour éviter le retour des Dragons, et les Serviteurs ont décidé d’envoyer Ilistore, la Femme Pâle. Elle a donc traqué les utilisateurs d’Art puis voulu empêcher la renaissance de Glasfeu. Elle voulait avoir le Fou sous son emprise pour l’empêcher de répandre ses idées folles. Fitz a donc été une victime collatérale de l’affrontement.
La Femme Pâle essaie de gagner la confiance de Fitz, elle le séduit, elle le tente. Elle essaie de lui embrouiller l’esprit, elle réécrit les événements à sa façon et elle est toute proche de convaincre Fitz. Elle veut lui montrer que les Loinvoyant ont tout fait pour le rabaisser, le priver de son accès légitime au trône puisqu’il est le fils de Chevalerie. Ils auraient tout fait pour le maintenir dans l’ignorance, le tenir en laisse.
A ce moment du récit, Fitz vient de vivre des jours difficiles. Il patauge dans la neige, se contente de maigres rations puisque il est à Aslevjal, l’endroit où attend Glasfeu. Lui et le Fou et Lourd ont été envoyés en arrière pour retrouver des disparus, ils tombent dans un piège. Retenu prisonnier, il fera face à la Femme Pâle qui lui offrira immédiatement du confort en signe de bonne volonté : de l’eau chaude, de la bonne nourriture et son corps.
Umbre : « Je dois obéissance au roi Fitz »
Il en aura fallu des années à Umbre pour traiter et considérer Fitz comme un adulte. On a toujours eu l’impression qu’il se considérait, malgré les années, comme le maître et Fitz l’élève. Pourtant, Fitz a montré plus d’une fois sa valeur et quand il prononce ses paroles, Fitz a 37 ans. Au-delà de l’âge de Fitz, c’est tout ce qu’il a accompli qu’il faut prendre en compte. Ses actions récentes (former Devoir à l’Art, libérer Glasfeu) ont permis à Devoir de montrer qu’il était un futur Roi digne et légitime. Ses conseils ont énormément servi à Kettricken et ont permis à la Montagnarde de se détacher d’Umbre. Umbre en a conscience, il se rend compte que ce n’est plus lui le conseiller de l’ombre à ce moment du récit, mais Fitz.
Toujours est-il que c’est avec un réel plaisir qu’on peut lire ces paroles : ils sont la reconnaissance officielle que les Loinvoyant ont accepté Fitz (ils font d’ailleurs écho à des propos tenus auparavant par Subtil ou Vérité) ; toutes les paroles qui montrent l’attachement des Loinvoyant au bâtard sont les bienvenues.
Bien entendu, Fitz n’est pas le roi. Il y a d’ailleurs une petite moquerie d’Umbre ici. Mais, rares sont ceux qui ont tenu tête à Umbre : Subtil, Chevalerie et Patience.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire